- Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.
Marius, Ludovic, Louis, Briet naît le 13 juillet 1902 à Chépy (Somme – 80), chez ses parents, Julien Briet, 47 ans, tisserand, et Félicité Amélie Létoquart, son épouse, 33 ans. Marius a un frère, Émile, né Létoquart en 1892 à Tours-en-Vimeu (80), et une sœur, Lucie, née en 1901 à Chépy. En 1906, son frère Émile, 14 ans, est serrurier chez L. Thomas (?).
À une date restant à préciser, son père, Julien Briet, décède.
Le 19 avril 1910, à la mairie de Valines (80), sa mère se remarie avec Paul Malloigne, 31 ans, serrurier ; Marius a 7 ans et demi.
En juillet 1912, la famille recomposée est installée rue de Cayeux à Belloy(-sur-Mer), hameau de Friville-Escarbotin (80).
Rappelé à l’activité militaire par le décret de mobilisation générale du 1er août 1914, Paul Malloigne rejoint le 14e régiment d’infanterie territoriale trois jours plus tard. Le 16 octobre suivant, il meurt à l’hospice mixte d’Amiens à la suite d’une blessure par accident. En 1915 (date restant à préciser), sa veuve met au monde leur fille, Paulette, née à Friville.
En 1931, Marius Briet habite avec sa mère, sa sœur Lucie et sa demi-sœur Paulette au 62 rue du Maréchal Foch à Belloy, par Friville-Escarbotin. Lucie, 20 ans, est alors ouvrière d’usine chez Beaurain (?), Paulette, 16 ans, est dactylo chez Maqueneche (?), Marius est limeur chez Auzoux (?). En 1936, toujours à la même adresse, Lucie est devenue perceuse chez Beaurain et Marius est ajusteur au chômage. Leur demie-sœur, Paulette Maligne, a quitté la maison.
En 1935, les élections municipales amènent une direction communiste à la mairie de Friville-Escarbotin.
Marius Briet devient serrurier.Le 23 octobre 1941, il est arrêté comme otage communiste par la Feldgendarmerie, assistée de gendarmes français réquisitionnés. Ils sont vingt-six hommes de l’arrondissement conduits à la Maison d’arrêt d’Abbeville où ils passent la nuit dans un atelier gardé par des sentinelles allemandes.
Le lendemain 24 octobre, peut-être après avoir été d’abord rassemblés à la citadelle d’Amiens, ils sont trente-huit du département à être internés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager) ; Marius Briet y est enregistré sous le matricule 1943.
Le 19 novembre 1941, le préfet de la Somme demande au commandant de la Feldkommandantur 580 d’Amiens la libération de dix-neuf détenus de son département arrêtés en octobre. Confirmant cette liste le 3 février 1942, il précise pour chacun d’eux : « Ne participe en aucune manière au mouvement communiste. A une attitude loyale vis-à-vis du gouvernement français et des autorités occupantes ». Marius Briet est du nombre.
Entre fin avril et fin juin 1942, celui-ci est néanmoins sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, Marius Briet est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45302 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée et identifiée [1]).
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.
Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau -, une moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I). Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Marius Briet.
Marius Briet meurt à Auschwitz le 10 août 1942, d’après le registre d’appel (Stärkebuch) et l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher), un mois après l’arrivée de son convoi.
Son nom est inscrit sur le Monument aux morts de Friville-Escarbotin, stèle dédiée « aux martyrs de la liberté assassinés dans les bagnes nazis ».
La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 25-10-1987).
Notes :
[1] Sa photographie d’immatriculation à Auschwitz a été reconnue par des rescapés lors de la séance d’identification organisée à l’Amicale d’Auschwitz le 10 avril 1948 (bulletin “Après Auschwitz”, n°21 de mai-juin 1948).
Sources :
Son nom et son matricule figurent sur la Liste officielle n°3 des décédés des camps de concentration d’après les archives de Pologne, éditée le 26 septembre 1946 par le ministère des anciens combattants et victimes de guerre, page 60.
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 369 et 401.
Archives départementales de la Somme, Amiens, site internet, archives en ligne : correspondance de la préfecture sous l’occupation (6w809) ; état civil de la commune de Chépy année 1902 (2E 190/15), acte n°14 (vue 115/138).
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) : registre d’appel avec la liste des détenus décédés ; relevé dans les archives du Musée (01-2009).
Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 133 (19373/1942).
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 20-02-2021)
Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).
En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.