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Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Léon, René, Busarello naît le 20 avril 1894 à Fagnon (Ardennes – 08), fils d’Antoine Busarello, 30 ans, marchand forain, et de Maria Beury, 24 ans, son épouse ; il a plusieurs frères et sœurs : Louis (né à Fagnon le 14 mai 1892), Madeleine, Arlette, Roger…

Pendant un temps, Léon Busarello travaille comme « conducteur de chevaux ». Il habite alors à Nantes (Loire-Atlantique).

Le 31 août, à la mairie de Nantes, Léon Busarello s’engage volontairement pour la durée de la guerre. Le lendemain, il est incorporé au 113e régiment d’infanterie, ordinairement basé à la caserne Maurice de Saxe, à Blois (Loir-et-Cher), mais qui est engagé dès le 22 août dans la bataille des frontières à Signeulx, au sud de la Belgique, où 1200 fantassins français sont mis hors de combat par les mitrailleuses allemandes. Du 7 au 11 septembre, le régiment participe à la bataille de la Marne.

Le 19 juillet 1919 à Dommiers (Aisne – 02), il se marie avec Gabrielle Flard, 23 ans, ouvrière agricole. À cette date, Léon Busarello est encore soldat au 21e régiment du Génie, mais déclare la profession d’ajusteur. Le couple aura huit enfants : Gabrielle, née le 16 février 1920, Louis, né le 23 juillet 1922, Madeleine, née le 14 avril 1925, Andrée, née le 28 août 1927, Mireille, née le 1er juin 1929, Odette, née le 4 mars 1931, et Arlette, née le 25 mai 1936.

Au moment de l’arrestation du chef de famille, celle-ci est domiciliée au 94, cité du Bois-de-Sapins à Soissons (02). Lui est déclaré comme brocanteur (avant cela, il semble avoir travaillé un temps comme serrurier).

Le 31 août 1941, le commissaire de police de la ville de Soissons écrit au préfet de l’Aisne, à Laon, pour lui transmettre « la liste de communistes notoires qui seront pris comme otages, par la Kreiskommandantur de Soissons, au cas où des incidents surviendraient dans la Ville ». Léon Busarello est le huitième des neuf hommes désignés, avec trois autres futurs “45000” : Charles Del-Nero, Jean Guier et Émile Maillard.

Le 19 septembre, le commissaire de Soissons transmet au préfet une liste de 240 « individus ayant appartenu comme militants ou sympathisants à l’ex-parti communiste de Soissons et de la région. Les plus mauvais sont marqués DANGEREUX », ce qui est le cas de Léon Busarello.

Le lendemain, 20 septembre, le commissaire principal des Renseignements généraux de Laon transmet au préfet une liste des « communistes notoires » des plusieurs localités du département « qui semblent continuer leurs agissements anti-nationaux ». Léon Busarello est parmi les dix-neuf hommes désignés pour Soissons et sa région.

Celui-ci est effectivement actif au sein du parti communiste clandestin, en contact avec la famille Richier, Alexandre Hebert (déporté), Léon Durville (fusillé) ; il serait responsable d’un dépôt d’armes.

Le 29 septembre 1941, à Courmelles, « banlieue de Soissons », une sentinelle allemande de garde à la porte de la Standortkommandantur est attaquée.

Dans la nuit du 29 au 30 septembre, Léon Busarello est arrêté à son domicile par la Feldgendarmerie, pris comme otage en représailles avec 17 autres militants communistes du secteur dont Léon Durville, qui sera fusillé le 21 février suivant, Gabriel Duponchelle, de Villeneuve-Saint-Germain, serrurier, Henry Malheurty, gérant des bains municipaux de Soissons, Charles Del Nero, Jean Guier et Émile Maillard ; une arme a été trouvée chez un militant communiste de Courmelles, Gaston Pinot [1]. Les 18 hommes sont conduits à la caserne Charpentier de Soissons.

Léon Busarello est finalement interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager), où il est enregistré sous le matricule n° 1604.

Le camp militaire de Royallieu en 1956. Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : « le camp des communistes ». En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Le camp militaire de Royallieu en 1956.
Au premier plan, en partant de la droite, les huit bâtiments du secteur A : le « camp des communistes ».
En arrière-plan, la ville de Compiègne. Carte postale, coll. Mémoire Vive.

Au soir du 20 février 1942, il assiste probablement au départ de Léon Durville la veille de son exécution (à Carlepont, Oise). En effet, dans sa dernière lettre – transmise à André Malheurty, mais dans laquelle il s’adresse à plusieurs copains – le condamné écrit : « Pardonne-moi, mon vieux Busa, j’étais plutôt blagueur que méchant, tu l’as bien compris et tu m’as pardonné, pense souvent à moi. Adieu ».

Entre fin avril et fin juin 1942, Léon Busarello est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de marchandises de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons à bestiaux. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Léon Busarello est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45318 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage actuellement connu ne permet de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Léon Busarello.Le 26 novembre, il est inscrit sur une liste de détenus passant au service SS de radiographie.

Léon Busarello meurt à Auschwitz le 30 novembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher). Motif inscrit : « pneumonie bilatérale ». Dans son cas, une cause de décès plausible…

André Faudry certifie sa disparition au camp d’Auschwitz.

Après la guerre, sa famille emménage au 18, rue de l’Hermet à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis – 93).

Le 15 août 1950, Albert Legaie, de Villeneuve-Saint-Germain, président des anciens FTPF, signe un document (?) relatif aux états de service de Léon Busarello dans la Résistance.

En juillet 1951, la mention Mort pour la France est inscrite sur l’acte de décès de Léon Busarello à la mairie de Soissons (fixant celui-ci au 6 octobre 1942…).

Le 23 juillet 1952, la commission nationale d’homologation de la Résistance intérieure refuse de l’admettre comme Résistant, ne le considérant que comme « victime civile (otage) ».

Le 3 mars 1953, faute d’attestations suffisantes, Gabrielle Busarello, en qualité d’ayant-cause, remplit un formulaire de demande d’attribution du seul titre de Déporté politique pour son mari. Néanmoins, dans les lignes à remplir pour les « renseignements relatifs au motif de l’exécution, de l’internement ou de la déportation », elle écrit un seul mot : « Résistant ». Le 21 novembre 1955, le ministère des Anciens combattants et victimes de la guerre décide de reconnaître le statut de déporté politique et lui adresse la carte n° 1175.07901 (arrivée le 2 février suivant).

Notes :

[1] Gaston Pinot : le 9 octobre 1941, un avis (Bekanntmachung – texte noir sur fond jaune) de l’armée d’occupation informe la population du Soissonnais que ce forgeron (ou cantonnier) de Courmelles a été fusillé à Laon (02) pour détention d’armes. Après la Libération, le Conseil municipal de Courmelles donne son nom à la place de l’Hôtel de Ville.


Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 360 et 397.
- Alain Nice, La guerre des partisans, Histoire des Francs-tireurs partisans français, Histoire de la Résistance ouvrière et populaire du département de l’Aisne, édition à compte d’auteur, janvier 2012, pages 34, 36, 39-43 (commande à adresser à Alain NICE – 9 rue de la Tour du Pin – 02250 BOSMONT-SERRE).
- Archives départementales des Ardennes (AD 08), site internet du conseil général, archives en ligne : table décennale de la commune de Fagnon du premier janvier 1883 au premier janvier 1893 (E2/CHARLEVILLE22) ; registres des matricules militaires, liste matricule des engagés volontaires non encore inscrits au registre matricule et des hommes des réserves étrangers à la subdivision pris en domicile, bureau de Mézières, classe 1914, de 251 à 400 (cote 1R 278), n° 397 (vue 185/188).
- Archives communales de Fagnon, acte de naissance (n° 1 du registre), transmis par Gérard Guillin, maire de la commune, accompagné d’une page du bulletin municipal, Qué nouvelles à Fagnon ? (« feuillet rapide » n° 6, de mars 2011), consacrée à Léon Busarello afin de préparer la commémoration de la journée de la Déportation.
- Archives départementales de l’Aisne (AD 02), Laon : dossiers du commissariat régional aux Renseignements généraux, surveillance des communistes (SC11276).
- Musée de la Résistance nationale (MRN) Champigny-sur-Marne (94) : carton “Association nationale de des familles de fusillés et massacrés”, fichier des victimes (4170).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC), doc. XLIV-25 (lettre de la Feldkommandantur 527 de Soissons).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 153.
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) ; acte de décès du camp (n° 42287/1942).
- Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen : dossier de Léon Busarello (21 P 432 035), recherches de Ginette Petiot (message 01-2014).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 6-02-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.