Jean, Adolphe, CHRISTIAN naît le 13 décembre 1921 à Paris 15e, fils d’Adolphe Christian et de Paulette Chauchard, son épouse.
Il effectue une partie de sa scolarité à l’école Jean-Baptiste Say, 11 bis, rue d’Auteuil à Paris 16e, où il fait la connaissance de Camille (Antoine) Gianni, frère cadet de Paul Gianni, et de Jean Nicolaï.
Au moment de son arrestation, Jean Christian est domicilié chez ses parents au 54, rue Olivier-de-Serres à Paris 15e, à l’angle de la Rue Leriche. Il est célibataire.
Après avoir été employé auxiliaire des PTT, au chômage au moment de son arrestation, Jean Christian est ultérieurement déclaré comme tourneur.
Sous l’occupation, il retrouve son ancien condisciple Camille Gianni, qui le présente à une responsable des Jeunesses communistes clandestines de leur arrondissement : Jeannine Gagnebin [1]. À partir de septembre 1940, Jean Christian intègre un “triangle” (trois garçons – lui-même, Paul Gianni et Jean Nicolaï – placé sous l’autorité de la jeune fille) qui fabrique des tracts et des papillons, puis les distribue et les colle.
Dans la nuit du 15 décembre 1940, vers 22 heures, rue des Volontaires, alors qu’il colle des affiches (« Pour que vos enfants aient du pain ») avec Camille Gianni, ils sont surpris par une patrouille d’agents cyclistes. Camille Gianni parvient à s’enfuir, mais lui est appréhendé. Sur place, les agents trouvent des exemplaires de l’affiche, des numéros de L’Humanité clandestine et d’autres documents.
Fouillé, Jean Christian est également trouvé porteur de bons des Comités populaires de chômeurs et de papillons (« Pas de camp de travail ! Du travail ! »). Enfin, lors de la perquisition à son domicile, les inspecteurs découvrent un carnet avec les noms de ses différents contacts. Interrogé par le commissaire de police du quartier de Saint-Lambert et devant les preuves qui l’accablent, Jean Christian livre toutes les informations qu’il possède sur son groupe.
Après lui sont arrêtés Jeannine Gagnebin, une autre jeune femme et quatre garçons (dont Camille et Paul Gianni, Jean Nicolai) ; un autre à quitté de domicile de ses parents la veille des arrestations pour n’y plus reparaître. Le 18 décembre, ils sont inculpés d’infraction au décret du 26 septembre 1939 par un juge d’instruction du tribunal de première instance de la Seine. Le lendemain, Jean Christian est placé sous mandat de dépôt à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e). Le 11 janvier 1941, lors des interrogatoires et de confrontations conduites par le juge d’instruction dans son cabinet, le prévenu est assisté par Maître Destable. Alors que les autres inculpés nient la plupart des faits, Jean Christian persiste à désigner le rôle de chacun.
Le 1er mars suivant, tous comparaissent devant la Chambre des mineurs (15e) du tribunal correctionnel de la Seine. Chacun maintien les déclarations faites lors de l’instruction. Jean Christian et Camille Gianni sont condamnés à six mois d’emprisonnement, les autres inculpés à des peines de trois ou quatre mois, aucun d’eux n’ayant d’antécédent judiciaire ni ne faisant l’objet de renseignement défavorable. Jean Christian commence à subir sa peine à la Santé. Le 13 mars, il est transféré à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (Seine / Val-de-Marne), où se trouve déjà Camille Gianni.
Le 3 mai, à l’expiration de leur peine, Jean Christian et Camille Gianni sont libérés.
Jean Christian est exclu des Jeunesses communistes pour « mouchardage et liaison avec la police ».
Le 25 septembre 1941, il s’engage comme volontaire pour travailler en Allemagne. S’il part une première fois (?), il est probable qu’il profite d’une permission pour rester en France.
Le 28 avril 1942, Jean Christian est arrêté à son domicile, comme otage, lors d’une grande vague d’arrestations (397 personnes) organisée par « les autorités d’occupation » dans le département de la Seine et visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin. Avec lui sont arrêtés ses anciens camarades : Jean Nicolaï et Paul Gianni. Les hommes arrêtés sont rapidement conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).
Entre fin avril et fin juin 1942, Jean Christian est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, Jean Christian est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46230, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule n’a pas été retrouvée ; sur certains registres allemands en France, ses nom et prénom sont inversés).
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.
Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage connu ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Jean Christian.
On ignore la date exacte de sa mort à Auschwitz ; probablement avant la mi-mars 1943.
Notes :
[1] Jeannine Gagnebin, épouse Gianni (Camille ?), née le 10 janvier 1923 à Paris 15), secrétaire, demeurant avenue Victor-Hugo à Thiais (Seine, Val-de-Marne). Après la guerre, elle est élue conseillère municipale communiste de Thiais le 26 avril 1953, sur une liste dirigée Émile Zimmermann (mandat achevé en 1959). Source : Maitron.
Sources :
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 372 et 399.
Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier national des déplacés de la Seconde guerre mondiale).
Archives de Paris : archives du tribunal correctionnel de la Seine, jugement du samedi 1er mars 1941 (D1u6-3733).
Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), site du Pré-Saint-Gervais : cartons “occupation allemande” (BA ?) ; dossier individuel au cabinet du préfet (1w910-40796), un seul document.
Musée de la Résistance nationale de Champigny (94) : fonds Deslandes (nombreux documents rassemblés par André Deslandes à la mémoire de son père Gaston et de son frère René).
Archives Départementales du Val-de-Marne (AD 94), Créteil : prison de Fresnes, détenus libérés le 3-5-41 (511W 14).
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 28-11-2023)
Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).
En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.