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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Georges, Louis, Collin naît le 4 avril 1894 à Semoutiers (Haute-Marne – 52),, chez une sage-femme. Il est le fils de Louise Collin, 29 ans, célibataire, déclarée sans profession, domiciliée à Poisson (52), où elle cultivera quelques arpents de vignes.

Pendant un temps, Georges Collin habite à Poissons et travaille comme “domestique de ferme”.

Le 11 septembre 1914, il est mobilisé au dépôt des équipages de la Flotte (Marine nationale). Il survit au naufrage de son navire, coulé par les Allemands. Il en revient affaibli par des attaques de paludisme.

Le 21 juillet 1919 à Thonnance-lès-Joinville (52), Georges Collin – déclaré “cultivateur”, mais encore “sous les drapeaux” – se marie avec Germaine Gabrielle Tharasse, née le 23 août 1900 à Noncourt (52).

Le 9 septembre suivant, il est envoyé en congé illimité de démobilisation par le 5e dépôt et se retire à Suzannecourt-près-Joinville (52), titulaire d’un certificat de bonne conduite.

Georges et Germaine Collon ont deux filles : Éva, née en 1921, et Marcelle, née en 1923, toutes deux à Thonnance. En 1931, ils habitent la Grande Rue de Thonnance, « côté droit en montant ». Cette année-là, Georges est conducteur d’auto aux Établissements Ferry Capitan et compagnie, à Bussy, sur la commune de Vecqueville, une usine métallurgique où travaillent Louis Bedet, Edmond Gentil, Bernard Hacquin et Louis Thiéry. Mais, Germaine, son épouse, décède prématurément.

Le 6 août 1932 à Fontaines-sur-Marne (52), Georges Collin épouse en secondes noces Marie Anna Bédet, née en 1905 à Fontaines. Ensemble, ils auront encore deux filles : Georgette, née en 1934 à Thonnance, et Ninon.Au moment de son arrestation, Georges Collin est domicilié à Thonnance-lès-Joinville, 20 rue du Maréchal Pétain.

Il est ouvrier à l’usine métallurgique Ferry-Capitain de Bussy, commune de Vecqueville, comme Louis Bedet, Edmond Gentil, Bernard Hacquin et Louis Thiéry.

Vecqueville près de Joinville. L’usine de Bussy dans un méandre de la Marne. Carte postale éditée après guerre. Coll. Mémoire Vive.

Vecqueville près de Joinville. L’usine de Bussy dans un méandre de la Marne.
Carte postale éditée après guerre. Coll. Mémoire Vive.

Lors des élections cantonales d’octobre 1937, le Parti communiste présente un nommé Georges Collin, ajusteur, comme candidat au Conseil d’arrondissement dans la circonscription de Joinville.

Le 22 juin 1941, Georges Collin est arrêté, parmi une soixantaine de militants communistes et syndicalistes interpellés en quelques jours dans la Haute-Marne [1] (dont 15 futurs “45000”), puis rassemblés à la prison de Chaumont (52).

Chaumont. La prison cellulaire. Carte postale des années 1900. Coll. Mémoire Vive.

Chaumont. La prison cellulaire. Carte postale des années 1900. Coll. Mémoire Vive.

Le 27 juin (?), il est transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C, qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C,
qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

Entre fin avril et fin juin 1942, Georges Collin est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp) ; Georges Collin se déclare alors comme mécanicien automobile. Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Georges Collin est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».  « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche”. « Arbeit macht frei » (Le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Pendant un temps, il est assigné au Block 17a. Le 24 août, il est admis au Block 28 de l’hôpital d‘Auschwitz pour « faiblesse » (Schwache).

Georges Collin meurt à Auschwitz le 26 août 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [2], qui indique pour cause de sa mort une « double pneumonie » (Beiderseitige Lungenentzündung)… au cœur de l‘été.

Son nom a été ajouté sur le monument « Aux enfants de Thonnance-lès-Joinville Morts pour la France 1914-1918 », rue de l’Église.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 28-10-1987).

Notes :

[1] L’ “Aktion Theoderich : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est définit le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – perquisitions à leur domicile et arrestations – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante. En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, créé à cette occasion pour la détention des « ennemis actifs du Reich » sous l’administration de la Wehrmacht. Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. 131 d’entre eux, arrêtés entre le 21 et le 30 juin, font partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. Concernant Georges Collin, c’est le 15 septembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 367 et 399.
- Marie-Christine Lamant-Héritier, petite-fille de Georges Collin, fille d’Éva (message 04-2012).
- Archives départementales de la Haute-Marne, archives en ligne : état civil de Semoutiers, registre NMD 1883-1902 (1 E 469/5) année 1894, acte n°4 (vue 70/121).
- Site Gallica, Bibliothèque Nationale de France, L’Humanité 14080 du 6 juillet 1937, page 4, “huitième liste…”.
- Club Mémoires 52, Déportés et internés de Haute-Marne, Bettancourt-la-Ferrée, avril 2005, p. 14.
- Archives départementales de la Côte-d’Or, Dijon : cote 1630 W, article 252.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 184 (25234/1942).
- Service d’information sur les anciens détenus, Biuro Informacji o Byłych Więźniach, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne.
- Site Mémorial GenWeb, relevé n° 19949 par René Jacquot (08-2004).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 4-01-2021)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.