Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.     Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,     Oswiecim, Pologne.     Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Maurice Courteaux naît le 16 février 1922 à Aubervilliers [1] (Seine / Seine-Saint-Denis – 93), fils d’Albert Courteaux, 32 ans, fondeur, et de Marie-Louise Marès, son épouse, 31 ans, domiciliés au 45, rue des Écoles.  Il a quatre sœurs : Raymonde, née en 1920, Odette, née en 1926, Gilberte, née en 1929, Denise, née en 1934 ; et un frère, Marcel, né en 1931.

Au moment de son arrestation, il est domicilié chez ses parents au 31, avenue Jean-Jaurès à La Courneuve [1] (93).

Il est célibataire (il a 20 ans).

Il est tourneur.

Le 16 septembre 1940, Maurice Courteaux est arrêté par les services du commissariat de police de la circonscription d’Aubervilliers dans le cadre d’une affaire de diffusion de tracts communistes impliquant douze personnes dont neuf jeunes gens, hommes et femmes.

Tous (?) sont conduits au dépôt, puis écroués à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e), comme l’indiquera un document ultérieur : « incarcéré à la prison de la Santé pour propagande communiste clandestine ». Le 10 octobre, ils sont remis aux autorités d’occupation, les hommes étant transférés à la prison militaire du Cherche-Midi (Paris 15e), qui dispose d’un tribunal.

Paris. La prison militaire du Cherche-Midi en 1903. Carte postale, collection Mémoire Vive.

Paris. La prison militaire du Cherche-Midi en 1903.
Carte postale, collection Mémoire Vive.

Le 31 octobre, une cour militaire allemande de Paris condamne Maurice Courteau à trois mois de prison, comme plusieurs de ses camarades : Boschetto, Gaudray, Royer, Sarrechia… Sa peine est confirmée le 29 novembre suivant. Le 5 décembre, il est transféré à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (Seine / Val-de-Marne).

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

L’établissement pénitentiaire de Fresnes après guerre.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 21 février 1941, Maurice Courteau est relaxé.

Le 28 avril 1942, il est arrêté à son domicile par des policiers français et des Feldgendarmes, comme otage, lors d’une grande vague d’arrestations (397 personnes) organisée dans le département de la Seine par les « autorités d’occupation », avec le concours de la police française et visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin ayant fait l’objet d’une poursuite judiciaire pour activité clandestine et ayant été libérés, soit après avoir bénéficié d’un non-lieu, d’un acquittement ou d’un sursis, soit après avoir fini de purger une courte peine, parmi lesquels beaucoup de jeunes gens. Les hommes arrêtés sont rapidement conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Maurice Courteaux est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Maurice Courteaux est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45407 (ce matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau – Maurice Courteaux est dans la moitié des membres du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».  « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ». « Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

En juillet 1943, comme les autres détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”), il reçoit l’autorisation d’écrire (en allemand et sous la censure) à sa famille et d’annoncer qu’il peut recevoir des colis.

À la mi-août 1943, Maurice Courteaux est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) au premier étage du Block 11, la prison du camp, pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

Auschwitz-I. Le premier étage du Block 11, avec ses fenêtres partiellement obstruées. Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Auschwitz-I. Le premier étage du Block 11, avec ses fenêtres partiellement obstruées. Carte postale. Coll. Mémoire Vive.

Le 12 décembre 1943, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, – qui découvre leur présence – et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blocks et Kommandos d’origine.

À la fin de l’été 1944, Maurice Courteaux est parmi les trente-six “45000” qui restent à Auschwitz, alors que les autres survivants sont transférés vers d’autres camps.

En janvier 1945, il est parmi les douze “45000” incorporés dans des colonnes de détenus évacués vers le KL [2] Gross-Rosen, dans la région de Wroclaw.

En février, il est parmi les quinze “45000” évacués vers le complexe concentrationnaire de Dora-Mittelbau et répartis dans différents Kommandos. Avec Pierre Felten et Jacques Marteaux, Maurice Courteaux est affecté à Dora-Osterode.

Le 11 avril 1945, le complexe concentrationnaire de Dora est évacué à son tour. Maurice Courteaux et Robert Daune sont dans les colonnes de détenus dirigés vers Hanovre et Bergen-Belsen. Maurice Courteaux s’évade au cours de cette marche de la mort.

Il est rapatrié le 30 avril.

L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation. Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945. Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation.
Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945.
Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

Le 8 juin suivant, à la mairie d’Aubervilliers, il se marie avec Ernestina Filippi.

Maurice Courteaux décède le 25 février 1972 à Saint-Denis, âgé de cinquante ans.

Notes :

[1] Aubervilliers et La Courneuve : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, ces communes font partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] KL  : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.

 

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 350 à 352, 358, 385 et 400.
- Archives communales de La Courneuve : registres de recensement de 1936 et de 1945, listes de déportés (4H126).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande” (BA ?).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 20-05-2019)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.