- Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.
Auguste Ducher naît le 3 juillet 1908 au Creusot (Saône-et-Loire). Il est orphelin a 19 ans. Il a – au moins – deux frères : Antoine, et François, né vers 1918.
Le 1er octobre 1938, il se marie avec Berthe, Suzanne, Plazanet, née le 9 avril 1918 à Arnage (Sarthe) ; ils n’ont pas d’enfant.
Le couple est domicilié dans un logement (3e étage, droite) au 28 rue Camille-Pelletan à Montrouge [1] (Seine / Hauts-de-Seine – 92).
Le 31 août 1937, Auguste Ducher entre comme magasinier à la Société indépendante de télégraphie sans fil (SIF), 162-170, route de Montrouge à Malakoff (92), où son épouse travaille comme monteuse. Il devient membre actif de la cellule communiste de cette entreprise.
Au cours de la guerre d’Espagne (dates à préciser…), il s’engage dans les Brigades internationales. Blessé, il doit rentrer en France (en août 1937 ?). Il est réembauché à la SIF sur la pression de ses camarades de travail qui menacent de faire grève.
Le 16 mars 1940, les agents du commissariat de police de la circonscription de Vanves effectuent à son domicile une perquisition qui se révèle infructueuse (ne trouvant ni tract, ni “papillon”).
Réformé n° 2 « au début des hostilités », il est mobilisé le 15 avril et renvoyé dans ses foyers le 31 août.
Sous l’occupation, la police française le considère comme un « meneur des plus actifs, se (livrant) en outre à une intense propagande verbale ». Il « serait chargé d’exécuter les ordres donnés par les militants Beauregard et Kort ». « On le représente au lieu de son travail comme très dangereux par ses opinions extrémistes » (c’est l’opinion du directeur…).
Le 24 septembre 1941, le préfet de police de Paris signe l’arrêté ordonnant son internement administratif en application du décret du 18 novembre 1939. Le jour même, Auguste Ducher est conduit au dépôt de la préfecture de police de Paris (Conciergerie, sous-sol du Palais de Justice, île de la Cité). Le 28 septembre, les autorités allemandes demandent son internement, effectif depuis quatre jours, peut-être comme ancien brigadiste
Le 9 octobre, Auguste Ducher est parmi les 60 militants communistes (40 détenus venant du dépôt – 20 venant de la caserne des Tourelles – transférés au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne) ; départ gare d’Austerlitz à 8 h 25, arrivée à Rouillé à 18 h 56.
Le 25 février 1942, son épouse écrit au préfet de police pour lui soumettre une étude objective de son cas afin que lui soit donné une solution équitable, juste, et qu’il lui soit rendu, d’autant qu’il est le seul soutien de ses frères, alors prisonniers en Allemagne.
Le 22 mai, Auguste Ducher fait partie d’un groupe de 156 internés – dont 125 seront déportés avec lui – remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).
Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises.
Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet, Auguste Ducher est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45493 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.
Le 13 juillet, après l’appel du soir, Auguste Ducher est très probablement dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.
En effet, à une date restant à préciser, il est admis au Block 28 de l’hôpital des détenus d’Auschwitz-I.
Il meurt à Auschwitz le 29 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) et une copie du registre de la morgue (Leichenhalle) relevée clandestinement par la résistance polonaise interne du camp, et où est inscrit le matricule n° 45493 (ce local de regroupement temporaire des cadavres est situé au sous-sol du Block 28).
Son nom est inscrit (ses prénoms étant réduits aux initiales) sur une des plaques dédiées « aux Montrougiens morts pour la France… », situées dans le hall de la mairie.
Notes :
[1] Montrouge : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).
Sources :
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 383 et 402.
Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles (SMAC), Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, camps d’internement… (BA 2374), liste des internés communistes 1939-1941 (BA 2397) ; dossier individuel des Renseignements généraux (77 W 28-98027) ; registre des consignés provisoires au Dépôt, mai 1941-mars 1942 (C C 2-1, n° 5046).
Archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC), Paris ; liste XLI-42, n° 72.
Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 242 (33120/1942).
Site Mémorial GenWeb, 92-Montrouge, relevé de Claude Richard (09-2007).
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 14-12-2023)
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En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.