- IDENTIFICATION INCERTAINE…
- Auschwitz, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.
Georges, Julien, Lumet naît le 17 juillet 1893 à Reuilly, entre Issoudun et Vierzon (Indre, à la limite du Cher), fils de Juliette Lumet, 25 ans, couturière. Bien que ses parents vivent en couple, son père ne le reconnaît pas aussitôt. Ils vont ensuite en région parisienne afin d’y trouver du travail.
Le 24 octobre 1896, à Ivry-sur-Seine (Seine / Val-de-Marne), le « garçon naturel » est légitimé par le mariage de sa mère (alors lingère, domiciliée chez son frère Jules Lumet, 31 ans, au 4, rue Moise prolongée à Ivry), avec Jean Baptiste Dupressoir, ébéniste de 27 ans, domicilié à Paris 15e. Élisabeth Dupressoir est alors enceinte de leur deuxième enfant, Léonie, Herminie, Alice, née le 18 août 1897 (décédée le 24/12/1980 à Plaisance, Gers). Elle aura ensuite une autre fille, Georgette, décédée en bas âge.
Le 6 juillet 1904, elle donne naissance à Jeanne, Blanche, née à leur domicile du 110, rue du Château à Paris 14e.
Élisabeth Dupressoir décède le 13 septembre 1905 à l’hôpital Necker, 151 rue de Sèvres (Paris 14e), âgée de 37 ans. Georges a 13 ans, sa sœur Léonie 8 ans et sa sœur Jeanne 14 mois. Jean Baptiste Dupressoir ne peut garder tous ses enfants auprès de lui : la plus jeune, Jeanne, est placée à l’Assistance publique.
Adolescent, Georges Dupressoir est écroué à la colonie correctionnelle de Gaillon (Eure), alors que son père habite au 49, rue Pernety à Paris 14e.
Le 20 novembre 1913, Georges Dupressoir est incorporé comme soldat de 2e classe au 79e régiment d’infanterie afin d’accomplir son service militaire. Mais, le 13 mars 1914, la commission spéciale de Nancy le réforme temporairement pour « bronchite avec tendance à la chronicité, amaigrissement de 6 kg », maladie antérieure à l’incorporation. Il retourne vivre chez son père, rue Pernety.
La Première Guerre mondiale commence le 2 août 1914. En octobre, Georges Dupressoir est alors domicilié au 91, rue de Vanves (devenue rue R.-Losserand) à Paris 14e.
Le 16 octobre, le conseil de révision de la Seine le classe “service auxiliaire”. Le 4 janvier 1915, il rejoint le 5e régiment d’artillerie. Le 16 octobre suivant, il manque à l’appel et, le 22 octobre, il est considéré comme déserteur. Une semaine plus tard, il est arrêté à Paris par la police, mais parvient sans doute à faire valoir son mauvais état de santé : le 28 décembre, la 3e commission de réforme de la Seine le réforme temporairement 1re catégorie pour « sclérose pulmonaire peu étendue ». Le 29 février 1916, la même commission le reconnaît apte au service. Entre temps, le 2e conseil de guerre de Paris le condamne à deux ans de travaux publics pour désertion à l’intérieur, mais il obtient une suspension de sa peine. Le 8 mars 1916, le gouverneur de Paris le fait passer au 104e régiment d’infanterie. Cependant, le 11 février, il est noté « parti en renfort aux armées » au 164e RI. Il est considéré comme ayant été aux armées contre l’Allemagne (sur le front) du 4 janvier au 28 décembre 1915 et du 8 mars au 3 août 1916. Le 1er septembre 1919, il est mis en congé illimité de démobilisation par le 3e régiment d’artillerie et se retire chez son père, rue Pernety.
Entre temps, pendant sa mobilisation, il est condamné à deux reprises par des tribunaux civils pour vol : le 13 février 1915, le tribunal correctionnel de la Seine le condamne à 8 mois de prison. Le 22 octobre 1917, la cour d’appel de Paris le condamne à 2 ans de prison pour le même motif.
Hors mariage, avec une personne de la Sarthe, il a une fille, Odette, née dans les années 1920.
Le 30 novembre 1920, le tribunal correctionnel de la Seine le condamne pour vol à 9 mois de prison, assortis de 5 ans d’interdiction de séjour.
Vers 1921, son père, Jean-Baptiste Dupressoir, retrouve sa sœur Blanche, alors âgée de 17 ans, après maintes tentatives de recherche, grâce à des interventions de personnes haut placées pour lesquelles il restaure des meubles.
Début 1923, Georges Dupressoir habite avec sa sœur, Léonie Dupressoir, couturière, au 1, rue Léopold-Robert (Paris 14e).
Le 17 février 1923, à Paris 14e, Georges Dupressoir, alors déclaré comme voyageur de commerce, se marie avec Germaine Sado, née le 8 novembre 1892 à Paris 14e, vendeuse, domiciliée chez ses parents au 100, rue de l’Ouest.
Le 21 juin 1924 à Montluçon (Allier), sa sœur Jeanne se marie avec Édouard Chaumot.
En mars 1926 et jusqu’au moment de son arrestation, Georges Dupressoir a un domicilie au 4, rue d’Aligre à Paris 12e.
Le 26 avril 1928, le tribunal correctionnel d’Angers le condamne à 4 mois de prison pour recel et infraction à interdiction de séjour.
Le 28 décembre 1932, la cour d’appel de Paris le condamne à 18 mois de prison et 5 ans d’interdiction de séjour suite à un jugement correctionnel rendu deux mois plus tôt pour tentative de vol.
Le 10 mai 1941, la police française l’arrête pour détention d’arme.
Le 5 mai 1942, Georges Dupressoir fait partie des quatorze internés administratifs de la police judiciaire (dont au moins onze futurs “45000”), détenus au dépôt de la Conciergerie, qui sont conduits avec trente-sept communistes à la gare du Nord, « à la disposition des autorités allemandes et dirigés sur Compiègne par le train de 5 h 50 » pour être internés au camp de Royallieu (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).
Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, Georges Dupressoir est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45511, selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.
Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau -, une moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I). Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Georges Dupressoir.
Il meurt à Auschwitz le 18 octobre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).
À la suite de son arrestation, puis après la Libération, son épouse et sa sœur Jeanne ont effectué des démarches, restées vaines, pour connaître son sort.
Germaine Dupressoir décède le 13 janvier 1948 à Paris 13e, âgée de 56 ans, après avoir toujours espéré le retour de son mari.
Sa sœur, Jeanne Chaumot, décède à Plaisance (Gers) le 6 octobre 1978.
Sources :
Message de Georges Chaumot, son neveu (11-2007 et 11-2018).
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 371 et 403.
Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier central).
Archives départementales de l’Indre, site internet, archives en ligne : registre d’état civil de Reuilly NMD 1893-1902 (3 E 171/39-41), année 1893, acte n° 35 (vue : 39/1244).
Archives départementales du Val-de-Marne, site internet du département, archives en ligne : mariages de l’année 1896, acte n° 175 (vue 136-137/168).
Archives de Paris, site internet, archives en ligne : registre des naissances du 14e arrondissement, année 1892 (V44 7033), acte n° 6510 (vue 18/32) ; registre des naissances du 14e arrondissement, année 1904 (14N 359), acte n° 4355 (vue 18/31) ; registre des décès du 14e arrondissement, année 1905 (14D 216), acte n° 5945 (vue 15/31) ; registres matricules du recrutement militaire, classe 1913, 3e bureau de la Seine, n° 3124 (D4R1 1748) ; registre des mariages du 14e arrondissement, année 1923 (14M 280), acte n° 281 (vue 16/31).
Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”, internés aux camps de Vaujours… – Tourelles (BA 1837).
Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 246 (36404/1942).
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 12-11-2018)
Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).
En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.