- IDENTIFICATION INCERTAINE…
- Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.
François Girard naît le 9 octobre 1910 à La Chapelle-Blanche-Saint-Martin (Indre-et-Loire – 37), fils de Charles Girard, 37 ans, et d’Emma Gallais, son épouse, 33 ans, tous deux instituteurs publics. François Girard a un frère, Charles, né le 19 décembre 1904, et deux sœurs, Thérèse, née le 8 avril 1906, et Mariette, née le 16 juin 1908, tous à Mouzay (37). Une domestique habite également la maison, Eugénie Georget, 24 ans.
En 1921, alors que son frère et ses sœurs sont partis, François Girard, 11 ans, vit encore avec ses parents à La-Chapelle-Blanche. En 1926, ils ne sont plus au village.
Au moment de son arrestation, il est domicilié à Pontlevoy (Loir-et-Cher – 41) ; son adresse reste à préciser. Il est célibataire.
François Girard est peintre (BTP ?).
Le 30 avril 1942, à Romorantin (41), cinq résistants communistes sont découverts par des soldats allemands alors qu’ils distribuent des tracts. Armés, ils ne se laissent pas arrêter et blessent les soldats, dont un sous-officier qui succombe à ses blessures. Les mesures de représailles prévoient l’exécution immédiate de dix communistes, Juifs et de proches des auteurs présumés. Vingt autres personnes doivent être exécutées si au bout de huit jours les « malfaiteurs » ne sont pas arrêtés. Des rafles sont opérées dans la ville et dans le département afin de pouvoir « transférer d’autres personnes vers l’Est, dans les camps de travaux forcés. »
Le lendemain 1er mai, François Girard est arrêté, probablement comme otage à la suite de ces événements. D’abord conduit à Romorantin puis détenu à Orléans, il est transféré au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 -Polizeihaftlager).
Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, François Girard est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45604 selon les listes reconstituées (la photo du détenu portant ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.
Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté François Girard.
Il meurt à Auschwitz le 18 septembre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp, alors qu’a lieu une grande sélection des « inaptes au travail » à la suite de laquelle 146 des “45000” sont inscrits sur le registre des décès (Sterbebücher) en deux jours (probablement tués d’une piqûre intracardiaque de phénol ou gazés [1]) ; sur l’acte de décès, la cause mensongère indiquée pour sa mort est « faiblesse cardiaque ».
Son nom est inscrit sur le Monument commémoratif élevé par la ville de Pontlevoy aux martyrs et victimes du nazisme, sur la place de la Foire.
Notes :
[1] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à éliminer des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail” (opération commencée en avril 1941, dans d’autres camps, sous le nom de code 14 f 13). Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés pour la chambre à gaz sont amenés en camions à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.
Sources :
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 150 et 153, 364 et 395.
Archives départementales de Touraine (Indre-et-Loire), site internet, archives en ligne : recensement de La Chapelle-Blanche-Saint-Martin (6NUM5/057/015), année 1911 (vue 2/34).
Archives départementales du Loir-et-Cher, fichier alphabétique des déportés du CRSGM (cote 56 J 5).
Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 348 (31575/1942).
Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), ministère de la Défense, direction des patrimoines de la mémoire et des archives (DPMA), Caen : liste de détenus français morts au camp de concentration d’Auschwitz relevée par le S.I.R. d’Arlosen (26 P 821 – Auch. 1/7), page 7, n° 128.
Site Mémorial GenWeb, relevé de Monique Diot Oury (06-2006).
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 23-06-2020)
Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).
En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.