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Henri Hannhart dans les années 1950.
Collection Claude Hannhart. Droits réservés.

Henri Hannhart naît le 20 juillet 1906 à Paris 10e arrondissement (75), fils de Frédéric Hannhart, mécanicien-ajusteur, et d’Henriette Perquin, cartonnière, qui légitiment sa naissance par leur mariage en 1907.

Bien que ses parents soient plutôt de tendance anarchiste, il est élevé chez les pères jésuites. Lui-même est attiré très jeune par l’idéal communiste.

Le 8 septembre 1928, à Alfortville [1] (Val-de-Marne – 94), Henri Hannhart se marie avec Denise Robinot, perlière. Ils auront deux enfants : Denise, née le 27 novembre 1931 à Alfortville, et Claude, Henri, né 6 juin 1936 à Alfortville.

Au moment de l’arrestation du chef de famille, celle-ci habite au 40, rue Édouard-Vaillant, à Alfortville.

Henri Hannhart est mécanicien (fraiseur outilleur), comme son père. Il travaille aux usines de machines automatiques Bardet, vers Charenton ou à Paris vers la Porte de Charenton.

Militant communiste, il est est élu conseiller municipal d’Alfortville le 5 mai 1935 sur la liste menée par Marcel Capron [2] et désigné délégué sénatorial suppléant en 1935, puis titulaire en 1938. Il assiste à toutes les séances du conseil municipal jusqu’à la suspension de la municipalité.

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La mairie d’Alfortville, après la guerre.
Carte postale, collection Mémoire Vive

Le 4 octobre 1939, le Président de la République – Albert Lebrun -, par décret et « sur la proposition du ministre de l’intérieur, suspend jusqu’à cessation des hostilités les Conseils municipaux » de 27 communes de la banlieue parisienne à majorité communiste, dont celui d’Alfortville, et les remplace par des Délégations spéciales composées de notables désignés.

À la suite de la déclaration de guerre, Henri Hannhart est mobilisé comme affecté spécial, peut-être dans son entreprise.

Le 29 février 1940, le conseil de préfecture de la Seine déchoit Henri Hannhart de son mandat électoral pour n’avoir pas « répudié catégoriquement toute adhésion au parti communiste… », comme 17 autres élus municipaux d’Alfortville (dont Marcel Mougin et Gaston Ruan, futurs “45000”) – avec effet rétroactif au 21 janvier.

Le 25 juillet, avec Gaston Ruan et Gilbert Lasséchère, Henri Hannhart est l’un des organisateurs de la manifestation pour “reprendre” la mairie d’Alfortville à la délégation spéciale. La même action est tentée à la mairie de Maisons-Alfort (impliquant Fernand Saguet,…).

Le soir même, à 19 h, Henri Hannhart est arrêté à son domicile par les agents du commissariat de Charenton : son fils Claude (4 ans et demi) court derrière la voiture de police quand elle l’emmène.

Après le commissariat de Charenton, où sont regroupés d’autres militants d’Alfortville et Maisons-Alfort, tous sont conduits dans la nuit au commissariat du 12e arrondissement, puis au dépôt de la préfecture de police de Paris (Conciergerie, sous-sol du Palais de Justice , île de la Cité). Enfin, le lendemain, ils sont écroués à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e).

Le 4 octobre, Henri Hannhart est relâché avec d’autres militants, à l’initiative semble-t-il de l’administration militaire allemande pour laquelle « vu la fragilité de (leur) cas, rien ne peut être retenu contre (eux) », et après qu’ils aient signé un engagement à « ne pas faire de propagande contre les autorités occupantes ».

Mais, le 7 octobre, le commissaire de Charenton en appelle au directeur des Renseignements généraux afin que tous soient de nouveau arrêtés, précisant : « Il est a peu près certain que tous ces militants vont reprendre une activité. Leur arrestation paraît s’imposer. »

Le 10 octobre suivant, à 6 heures du matin – comme la plupart des militants libérés quelques jours plus tôt -, Henri Hannhart est arrêté par des inspecteurs français qui viennent le chercher à son domicile pour le conduire au commissariat de Charenton. Un car de police vient les prendre pour les amener à la préfecture de police de Paris pour identification, puis au dépôt. Le lendemain, Henri Hannhart fait partie d’un groupe d’internés administratifs transférés en car au “centre de séjour surveillé” d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé au début du mois dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt. Il y partage une chambre avec Gilloux, Lasséchère, Gaston Ruan d’Alfortville et Fernand Saguet de Maisons-Alfort (les deux derniers seront des “45000”).

Aincourt. Le sanatorium de la Bucaille. Au premier plan, le pavillon qui fut transformé en camp d’internement. Carte postale oblitérée en 1958. Coll. Mémoire Vive.

Aincourt. Le sanatorium de la Bucaille. Au premier plan, le pavillon qui fut transformé en camp d’internement.
Carte postale oblitérée en 1958. Coll. Mémoire Vive.

Le 4 décembre, Henri Hannhart fait partie d’un groupe d’une centaine d’internés « choisis parmi les plus dangereux » transférés, par mesure préventive, à la Maison centrale de Fontevraud-L’Abbaye [3], près de Saumur (Maine-et-Loire ) ; leur transport s’effectue en car et sous escorte. Les détenus sont enfermés dans une grande salle commune de la Centrale. Ils apprennent que 70 communistes purgent une peine dans le secteur carcéral, parmi lesquels Charron, Maire de Vigneux et une vingtaine de jeunes.

    Fontevraud, l’ancien réfectoire des moines.     Carte postale des années 1900. Collection Mémoire Vive.

Fontevraud, l’ancien réfectoire des moines.
Carte postale des années 1900. Collection Mémoire Vive.

Le 20 janvier 1941, sans être informés de leur destination, la même centaine d’internés est conduite à la gare de Saumur où les attendent deux wagons de voyageurs à destination de Paris-Austerlitz. À leur arrivée, ils sont conduits à la gare de l’Est. Ils y rejoignent 69 autres militants communistes en attente de transfert. Dans son compartiment, Henri Hannhart se retrouve avec Saguet, Ruan, Guy (Maurice ?), Eugène Hénaff et Martin (?), encadrés par deux gendarmes.

Le train les amène à la gare de Clairvaux (Aube – 10). Henri Hannhart écrit : « La gare ? Petite, sans importance, et – alentour – nulle trace de prison. » En sortant des wagons, ils sont conduits, par rotation d’un unique fourgon cellulaire, à Maison centrale de Clairvaux. Dans le véhicule, Henri Hannhart partage une “cabine” avec Fernand Saguet. Plus loin dans son cahier, il ajoute : « …nous voyons toutefois que nous traversons un village et nous crions tous : “Ce sont des honnêtes gens qui passent votre village, nous sommes des communistes.” Le village se nomme Ville-sous-la-Ferté… »

Une fois arrivés, la direction les contraint à échanger leurs vêtements civils contre la tenue carcérale, dont un tour de cou bleu (“cravate”) et un béret. Ceux qui refusent sont enfermés une nuit en cellule (“mitard”), tandis que la plupart sont assignés à des dortoirs. Ils passent au service anthropométrique (photos ?). Rejoints par d’autres, ils sont bientôt 300 internés politiques.

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Clairvaux. Porte n°2. Carte postale années 1960.
Collection Mémoire Vive.

Le 1er juin, Henri Hannhart écrit au préfet de la Seine, expliquant qu’ayant été « arrêté sans aucun motif ni inculpation », il a déjà écrit « à diverses autorités autorités, notamment à Monsieur le Ministre, pour lui en demander les raisons, mais sans réponse ». Il lui demande de procéder à une enquête à son sujet et de le faire libérer. Et, en attendant, de décider son transfert depuis la centrale vers un centre de séjour surveillé auquel ont droit tous les internés administratifs, « car ici nous côtoyons les condamnés : nous avons le même régime alimentaire, c’est-à-dire soupe le midi et un peu de pitance, et le soir soupe seulement, le tout dans des gamelles et assiettes rouillées. Nous n’avons même pas droit à nous procurer avec notre argent vin ou boisson quelconque et ne buvons que de l’eau, en un mot, le même régime que les droit commun. »

Le 25 juin, son avis ayant été sollicité par le 1er bureau de cabinet du préfet de police, le directeur des Renseignements généraux répond que « la libération de Hannhart ne paraît pas devoir être envisagée dans les circonstances actuelles ».

Le 23 septembre, J.-P. Ingrand, préfet délégué du ministre de l’Intérieur dans les Territoires occupés (à Paris), demande au préfet de l’Aube de retirer de Clairvaux les internés administratifs qui y sont « hébergés » (sic !) ; ordre rapidement exécuté. Le jour-même, le commissaire de police de Troyes vient informer les internés politiques qu’ils sont dorénavant considérés comme otages par les autorités allemandes. Il demande à trois anciens élus – Racamond, Philippot et Le Bigot – d’organiser la séparation des internés en deux groupes pour leur transfert, vers les camps de Gaillon et de Rouillé ; concours que ceux-ci refusent. Le lendemain, Henri Hannhart est parmi la centaine d’internés de Clairvaux transférés en train, via Paris, au “centre de séjour surveillé” (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne).

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-

Le 9 février 1942, il est parmi les 52 « communistes » (dont 36 seront déportés avec lui) remis aux autorités d’occupation à la demande de celles-ci et conduits par des Feldgendarmes à la gare de Poitiers.

Enfermés dans deux wagons à bestiaux, ils sont transférés – via Paris – au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Ils sont provisoirement installés dans un baraquement vide du camp C (« camp des Juifs ») avant d’être intégrés au camp A (« camp des communistes »).

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ; à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8. Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ;
à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8.
Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Tout au long de sa détention jusqu’à son arrivée à Compiègne, Henri Hannhart rédige des cahiers témoignant de son vécu. Il fabrique également des jouets en bois (avion, bateau, coquetiers…).

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Cette bague en bois porte
les initiales de Denise.
Coll. Claude Hannhart.
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Collection Claude Hannhart. Droits réservés.
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Collection Claude Hannhart. Droits réservés.
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Le bateau de Claude (son nom y est gravé).
Collection Claude Hannhart. Droits réservés.

Ceux-ci, avec d’autres affaires rassemblées dans sa valise, parviendront à son épouse le 8 juillet, après le départ du convoi : elle le croira décédé…

Entre fin avril et fin juin 1942, Henri Hannhart est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30. Sa famille ne reçoit pas de message jeté du train, ni de carte-formulaire de la direction pour la prévenir de son départ.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Henri Hannhart est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45652 (ce matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard).

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Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp) ; Henri Hannhart se déclare alors comme électricien. Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Henri Hannhart est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

En juillet 1943, comme les autres détenus politiques français d’Auschwitz (essentiellement les quelques 135 à 140 survivants des “45000”), il reçoit l’autorisation d’écrire (en allemand et sous la censure) à sa famille et d’annoncer qu’il peut recevoir des colis.

À la mi-août , il est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) et mis en “quarantaine” au premier étage du Block 11, la prison du camp, pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 - où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues - et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”. Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Auschwitz-I. La cour séparant le Block 10 – où se pratiquaient les expérimentations “médicales” sur les femmes détenues -
et le Block 11, à droite, la prison du camp, avec le 1er étage de la “quarantaine”.
Au fond, le mur des fusillés. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 12 décembre, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, – qui découvre leur présence – et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blockset Kommandos d’origine.

Le 3 août 1944, Henri Hannhart est parmi les trois-quarts des “45000” présents à Auschwitz qui sont de nouveau placés en “quarantaine” en préalable à un transfert.

Le 29 août , il est parmi les trente “45000” [4] intégrés dans un convoi disciplinaire de 807 détenus (incluant de nombreux “Prominenten” polonais) transférés au KL [5] Sachsenhausen, dans la ville d’Oranienbourg, au Nord-Ouest de Berlin. À leur arrivée, et jusqu’au 25 septembre, les trente sont affectés au Block 66.

Début octobre, Henri Hannhart est parmi les huit “45000” transférés avec d’autres détenus à Kochendorf (Kommando de Natzweiler-Struthof), dans le Bade-Würtemberg, dans une ancienne mine de sel aménagée en usine souterraine pour la construction des V2.

Fin mars 1945, le même groupe est dans une colonne de détenus évacués à marche forcée jusqu’à Augsbourg, puis en train jusqu’au KL Dachau, où ils arrivent le 8 avril.

Le camp est libéré par l’armée américaine le 29 avril. Sur sa carte de déporté, Henri Hannhart est déclaré libéré le 15 mai 1945, date probable de son retour ; il passe par l’hôtel Lutétia.

L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation. Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945. Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

L’hôtel Lutetia, à Paris 6e. Siège de l’Abwehr (service de renseignements de l’état-major allemand) sous l’occupation.
Centre d’accueil des déportés au printemps-été 1945.
Carte postale, années 1940-1950. Collection Mémoire Vive.

Après l’arrestation de son mari, son épouse, Denise, met leurs deux enfants en nourrice à Arpajon (91), chez une gentille infirmière, veuve depuis la guerre 1914-1918. Elle leur rend visite le dimanche, ayant eu la chance d’être embauchée – grâce à des appuis militants – à la cantine d’entreprise de l’usine où son mari travaillait.

À son retour, après trois ans de séparation, son fils Claude a du mal à reconnaître l’homme très amaigri et malade qui se présente à lui.

Entretemps, selon l’arrêté du 4 novembre 1944 et malgré son absence, Henri Hannhart a été désigné par le Comité local de libération comme membre de la Délégation spéciale (Conseil municipal provisoire). Fidèle à son engagement politique, il retrouve son siège aux élections municipales du 19 octobre 1947. Il ne dira, ni n’écrira rien de sa déportation…

Henri Hannhart est homologué comme “Déporté politique” (carte n° 110116107).

Il travaille comme fraiseur-outilleur aux usines Citroën. Devenu parisien, il habite successivement à plusieurs adresses : 40, rue Édouard-Vaillant, 10e ; 11, rue Goethe, 16e ; 7 et 9 rue Léon Morane, 15e.

Il décède le 12 décembre 1966, à 60 ans.

Selon sa petite-fille, ce « petit bonhomme aux mains rugueuses », « sans amertume mais en colère… (…) se taisait avec pudeur sur ce qui l’avait blessé le plus : la difficulté à envisager que l’homme ait pu être à ce point mauvais. » Il a rapporté aux siens « que, l’une des rares fois où on lui avait servi de la viande à manger, c’était un doigt humain ; (ce qui) faisait beaucoup rire ses geôliers ». Cependant, les épreuves traversées n’ont pas empêché Henri Hannhart de « garder un humour féroce ».

Dans le document élaboré par la section FNDIRP (Fédération des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) d’Alfortville (après 1987…), n’est retenu que son court passage par Dachau (où il a été libéré).

Notes :

[1] Alfortville : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[2] Marcel Capron : peu après la signature du pacte germano-soviétique, le député-maire d’Alfortville prend ses distances avec la direction du PCF et finit par s’associer avec Marcel Gitton dans une tentative pour rallier le milieu ouvrier à la collaboration, notamment auprès des internés des camps.

[3] Fontevraud-L’Abbaye, souvent orthographié Fontevrault-L’Abbaye au 19e siècle.

[4] Les trente d’Auschwitz vers Sachso (ordre des matricules, noms de G à P) : Georges Gourdon (45622), Henri Hannhart (45652), Germain Houard (45667), Louis Jouvin (45697), Jacques Jung (45699), Ben-Ali Lahousine (45715), Marceau Lannoy (45727), Louis Lecoq (45753), Guy Lecrux (45756), Maurice Legal (45767), Gabriel Lejard (45772), Charles Lelandais (45774), Pierre Lelogeais (45775), Charles Limousin (45796), Victor Louarn (45805), René Maquenhen (45826), Georges Marin (45834), Jean Henri Marti (45842), Maurice Martin (45845), Henri Mathiaud (45860), Lucien Matté (45863), Emmanuel Michel (45878), Auguste Monjauvis (45887), Louis Mougeot (45907), Daniel Nagliouk (45918), Émile Obel (45933), Maurice Ostorero (45941), Giobbe Pasini (45949), René Petijean (45976) et Germain Pierron (45985).

[5] KL  : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.

Sources :

- Claude Pennetier et Nathalie Viet-Depaule, notice dans le Dictionnaire biographique du mouvement ouvrier français, sous la direction de Jean Maitron, Éditions de l’Atelier/Éditions Ouvrières, 1990-1997 CD-Rom (citant : Arch. Dép. Seine, DM3 ; versement 10451/76/1 ; listes électorales et nominatives – Arch. PPo. 101 – État civil de Paris (10e et 15e arr.) et d’Alfortville – Arch. Com. d’Alfortville – Renseignements recueillis par Michèle Rault et Nadia Michel).
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 348 et 349, 358, 387 et 407.
- Henri Hannart, Un épisode des années 40, Matricule : F 45652 (les intérêts de certains ont fait le malheur des autres), trois cahiers dactylographiés par son fils Claude (qui en a pris connaissance après le décès de sa mère).
- Témoignage et documents de Claude Hannhart et Sylvie Hannhart Andrac, petite-fille d’Henri Hannhart (05-2007).
- Archives municipales d’Alfortville, recherches menées par Corinne Nortier (divers documents…).
- Le nazisme à Alfortville (1940-1944), les victimes, document élaboré par la section FNDIRP d’Alfortville (après 1987…).
- Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “occupation allemande” : BA 2374 (camps d’internement…) ; BA 2397 (liste des internés communistes, 1939-1941) ; carton “PC” n°VII, A.S. du 20 décembre 1940 sur le CSS d’Aincourt.
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux, centre de séjour surveillé d’Aincourt ; cote 1W122 (notice individuelle).
- Archives départementales de la Vienne, 109W75 (camp de Rouillé).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) ; liste XLI-42, n° 97.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 1-10-2013)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.