Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

René, Marcel, Maroteaux naît le 27 janvier 1922 à Puteaux [1] (Seine / Hauts-de-Seine – 92), fils de Lucien Maroteaux et d’Alice Ramaget.

Au moment de son arrestation, il est domicilié au 29, rue Cartault à Puteaux. Il est célibataire (il a alors 18 ans…).

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Puteaux. Groupe Nord des HBM de la rue Cartault.
Carte postale oblitérée en 1934. Coll. Mémoire Vive.

Le 30 mai 1937, René Maroteaux est embauché aux Établissements Talbot aviation, comme petite-main fraiseur, travaillant pour la Défense nationale à partir de la déclaration de guerre de septembre 1939 et gardant son emploi jusqu’au 10 juin 1940 (débâcle et exode).

Le 11 septembre 1940, René Maroteaux, Georges Capliez, Pierre Bourneix fils, et trois autres jeunes militants de Suresnes et Puteaux sont arrêtés par la police française et écroués à la Maison d’arrêt de la Santé (Paris 14e) pour « propagande communiste clandestine ». Ils sont probablement libérés peu de temps après sur décision des autorités allemandes.

Le 9 novembre, sur instruction des Renseignements généraux, le préfet de police de Paris signe un arrêté ordonnant l’internement administratif de René Maroteau. Il est conduit le jour-même au camp français d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), « centre de séjour surveillé » créé en octobre 1940 dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt.

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Aincourt. Le sanatorium de la Bucaille. Au premier plan,
le pavillon qui fut transformé en camp d’internement.
Carte postale oblitérée en 1958. Coll. Mémoire Vive.

Comme Pierre Bourneix, René Maroteaux est assigné au “dortoir des jeunes” (“DJ”), ancien réfectoire réaffecté à cet usage pour cause de surpopulation dans le bâtiment.

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Sanatorium de la Bucaille à Aincourt.
Une salle de réfectoire. Peut-être celle du bâtiment
où se trouvent les communistes internés et qui
– vidé de ses tables – deviendra le dortoir des jeunes.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Le 6 mars 1941, sur le formulaire de « Révision trimestrielle du dossier » de René Maroteaux à la rubrique « Avis sur l’éventualité d’une mesure de libération », le commissaire spécial, directeur du camp, émet un avis défavorable en s’appuyant sur le constat que cet interné est un « communiste certain, suit les directives du parti communiste », lui reconnaissant qu’il « n’a jamais été puni » mais ajoutant à sa charge : « ne participe pas aux corvées – évite le travail ».

Le 5 mai 1942, René Maroteau fait partie d’un groupe de détenus transférés au “centre de séjour surveillé” de Voves (Eure-et-Loir). Enregistré sous le matricule n° 431, il ne reste que cinq jours dans ce camp.

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Entrée du camp de Voves.
Date inconnue, probablement après mars 1943.

Le 10 mai, il fait partie des 81 internés remis aux “autorités d’occupation” à la demande de celles-ci et transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht(Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, René Maroteau est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Les deux wagons à bestiaux
du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise
d’où sont partis les convois de déportation. Cliché M.V.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, René Maroteau est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45837 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20. Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés aux travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – il est dans la moitié des membres du convoi qui est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir.

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Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le « camp souche ».
« Arbeit macht frei » : « Le travail rend libre »
Carte postale. Collection mémoire Vive.

Il meurt à l’ “hôpital” d’Auschwitz (Block 20) le 16 août 1942, d’après les registres du camp [2] ; cinq semaines après l’arrivée du convoi. Il a 20 ans. (aucun des douze “45000” de Puteaux n’a survécu)

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 9-12-1994).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 383 et 412.
- Archives de la préfecture de police de Paris, cartons “Occupation allemande” : BA ?.
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux, centre de séjour surveillé d’Aincourt ; cotes 1w74 (révision trimestrielle), 1w76, 1w80 ; recherches parallèles de Claude Delesque).
- Liste “DJ” partielle de Fernand Devaux, décembre 2006.
- Comité du souvenir du camp de Voves, liste établie à partir des registres du camp conservés aux Archives départementales d’Eure-et-Loir.
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 1, page 120* (registre de la morgue relevé par la Résistance) ; tome 3, page 783 (21015/1942), orthographié « Marotaux ».

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 24-02-2013)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.

[1] Puteaux : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert effectif en janvier 1968).

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ.

Concernant René Maroteaux, c’est le mois de janvier 1943 qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.