François Olivo naît le 14 novembre 1899 à Guern (Morbihan), “au bourg”, fils de Joseph Olivo, 61 ans (sic), journalier, et d’Anne Le Pennec, 30 ans.
À une date restant à préciser, il rejoint la région parisienne, s’installant au 59 rue de Saint-Denis à Bobigny (Seine / Seine-Saint-Denis – 93), et travaillant comme manœuvre.
Le 23 avril 1918, il est mobilisé au 118e régiment d’infanterie comme soldat de 2e classe. Le 28 août suivant, il rejoint le 116e R.I. “aux armées”.
Le 14 décembre 1918 – certainement lors d’une permission -, François Olivo se marie à Bobigny avec Henriette Turpin, née le 20 février 1900 à Saizy (Nièvre).
Le 9 mai 1919, il est affecté à la 9e compagnie. Le 26 juillet, il passe au 2e régiment de chasseurs. Il participe à l’occupation des Pays Rhénans.
En 1920, à Stains (93), naît sa fille Simonne (?).
Le 25 mars 1921, il est renvoyé dans ses foyers, titulaire d’un certificat de bonne conduite et se retire au 159 route de Bobigny à Saint-Denis (93).
Le 4 mai suivant, il est rappelé à l’activité militaire. Cinq jours plus tard, il passe au 18e régiment de dragons. Le 3 juin, il est réaffecté au 2e régiment de chasseurs. Quatre jours plus tard, il est de nouveau renvoyé dans ses foyers.
Fin mars 1921 (?), il habite à Orsonville (Seine-et-Oise / Yvelines – 78) à la pointe sud du département. Lors du recensement, Henriette Taupin habite rue d’Aunay (31) et travaille comme journalière chez Charles Pitbois, patron cultivateur. Leur fils Roger Lucien François y naît le 14 décembre de cette année.
François Olivo travaille alors comme maraîcher.
Le 16 mars 1923, il est embauché par la Compagnie de chemin de fer de Paris à Orléans (P.O. – Chemins de fer d’Orléans et du Midi) qui fusionnera avec d’autres au sein de la SNCF début 1938 [1].
En avril suivant, il habite à Chalo-Saint-Mars (Seine-et-Oise / Essonne), limitrophe d’Étampes. Sa fille René y naît en 1924, et son fils René en 1926. Cette année-là, François est « agent de la voie », Henriette est nourrice, et le foyer accueille deux nourrissons parisiens.
En septembre 1927, il habite à Ablis-Paray (78).
Début mai 1931 et jusqu’au moment de l’arrestation du chef de famille, celle-ci est domiciliée à Boinville-le-Gaillard, commune voisine (78).
François Olivo est alors cantonnier à la gare SNCF de Paray-Douaville (78), secteur d’Ablis-Paray.
Communiste, il continue « de défendre les droits des agriculteurs », indique son fils.
Au cours de la “drôle de guerre”, François Olivo est arrêté pour « distribution de tracts d’origine étrangère ».Le 13 septembre 1939, il est révoqué de son emploi, selon une note ultérieure de la SNCF.
Un tribunal militaire le condamne à six mois d’emprisonnement.
Le 22 février 1940, il est en détention à l’établissement pénitentiaire de Fresnes (Seine / Val-de-Marne).
Le 31 janvier 1940, François Olivo a été définitivement révoqué de son emploi à la SNCF par arrêté ministériel pour « menées antinationales depuis le début de la guerre » [sic].
Le 22 juin 1941, il est à arrêté par la police allemande [2] à Orsonville et interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), Frontstalag 122 – Polizeihaftlager. François Olivo y est enregistré sous le matricule n° 1342.
Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures puis repart à la nuit tombée : Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, François Olivo est enregistré à Auschwitz, peut-être sous le numéro 45935, selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.
Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté François Olivo.
Il meurt Auschwitz le 19 septembre 1942, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher), alors qu’a lieu une grande sélection des “inaptes au travail” à l’intérieur du camp au cours de laquelle 146 des “45000” sont inscrits sur le registre des décès en deux jours (probablement tués d’une piqûre intracardiaque de phénol ou gazés [3]).
Il est déclaré “Mort pour la France” (11/8/1950). Son nom figure sur le Monument aux Morts de Boinville-le-Gaillard. Une plaque a été apposée dans la gare de Paray-Douaville.
Henriette Olivo décède le 7 décembre 1959 à Boinville-le-Gaillard.
Notes :
[1] La SNCF : Société nationale des chemins de fer français. À sa création, suite à une convention validée par le décret-loi du 31 août 1937, c’est une société anonyme d’économie mixte, créée pour une durée de 45 ans, dont l’État possède 51 % du capital.
[2] L’ “Aktion Theoderich” : L’attaque de l’Union soviétique, le 22 juin 1941, se fait au nom de la lutte contre le “judéo-bolchevisme”. Dès mai 1941, une directive du Haut-commandement de la Wehrmacht pour la “conduite des troupes” sur le front de l’Est défini le bolchevisme comme « l’ennemi mortel de la nation national-socialiste allemande. C’est contre cette idéologie destructrice et contre ses adeptes que l’Allemagne engage la guerre. Ce combat exige des mesures énergiques et impitoyables contre les agitateurs bolcheviks, les francs-tireurs, les saboteurs et les Juifs, et l’élimination allemande de toute résistance active ou passive. » Hitler est résolu à écraser par la terreur – à l’Ouest comme à l’Est – toute opposition qui viendrait entraver son effort de guerre. Le jour même de l’attaque contre l’Union soviétique, des mesures préventives sont prises dans les pays occupés contre les militants communistes – arrestations et perquisitions à leur domicile – et des ordres sont donnés pour punir avec la plus extrême sévérité toute manifestation d’hostilité à la puissance occupante. En France, dans la zone occupée, au cours d’une opération désignée sous le nom de code d’Aktion Theoderich, plus de mille communistes sont arrêtés par les forces allemandes et la police française. D’abord placés dans des lieux d’incarcération contrôlés par le régime de Vichy, ils sont envoyés, à partir du 27 juin 1941, au camp allemand de Royallieu à Compiègne, administré par la Wehrmacht et réservé à la détention des « ennemis actifs du Reich ». Au total, 1300 hommes y seront internés à la suite de cette action. Fin août, 200 d’entre eux font déjà partie de ceux qui seront déportés dans le convoi du 6 juillet 1942.
[3] Les chambres à gaz du centre de mise à mort situé à Birkenau fonctionnent principalement pour l’extermination des Juifs dans le cadre de la “Solution finale”, mais, jusqu’en mai 1943, elles servent également à liquider des détenus, juifs ou non, considérés comme “inaptes au travail” (opération commencée en avril 1941, dans d’autres camps, sous le nom de code 14 f 13). Les détenus d’Auschwitz-I sélectionnés pour la chambre à gaz sont amenés en camions à Birkenau. Quelquefois, ils attendent la mort au Block 7 de ce camp.
Sources :
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 150 et 153, 378 et 415.
Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et les “31000” de Bretagne (22-29-35-44), 2002, citant : Acte de mariage – Bureau des archives du monde combattant : fichier national des déplacés de la Seconde guerre mondiale.
Archives départementales des Yvelines et de l’ancien département de Seine-et-Oise (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt, dossier individuel comme communiste du département, liste de révoqués de la SNCF datée du 13 février 1942 (1W144).
Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 : relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrit, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 882 (31738/1942).
Base de données des archives historiques SNCF ; service central du personnel, agents déportés déclarés décédés en Allemagne (en 1947), de A à Q (0110LM0108).
Cheminots victimes de la répression 1940-1945, mémorial, ouvrage collectif sous la direction de Thomas Fontaine, éd. Perrin/SNCF, Paris, mars 2017, pages 1107-1108.
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 6-11-2023)
Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).
En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.