Honoré Oursel © Simone Oursel

Honoré Oursel © Simone Oursel

Honoré, François, Oursel naît le 7 février 1888 à Criquebeuf-sur-Seine (Eure), sous le nom de sa mère, Eugénie Hattingois, 22 ans, journalière. Il est reconnu et légitimé le 7 octobre 1889 à Criquebeuf par le mariage de sa mère avec François Honoré Oursel, 26 ans, journalier, dont il prend le patronyme.

En 1912, il est domicilié au 3 avenue de Choisy à Villeneuve-Saint-Georges [2] (Seine-et-Oise / Val-de-Marne – 94).

Le 23 décembre 1912 à Villeneuve-Saint-Georges, Honoré Oursel, 24 ans, marinier, se marie avec Adrienne Alphonsine Finon, 21 ans, épicière. Par ce mariage, les époux reconnaissent et légitiment l’enfant Maurice Armand Finon, né d’Adrienne le 27 août 1909 à Villeneuve-Saint-Georges. Les témoins des mariés sont une tante de l’épouse venue de Oissel (Seine-Inférieure), un autre marinier et deux employés de chemin de fer.

Mobilisé en 1914, Honoré Oursel est fait prisonnier de guerre. Il reste en Allemagne jusqu’en 1919, après sa libération, car il participe aux soins donnés à des soldats atteints du typhus.

Il est capitaine de remorqueur à la compagnie fluviale HPLM [1].Le 12 novembre 1932, à Villeneuve-Saint-Georges, son fils, Maurice Oursel, se marie avec Antoinette Pitton.

Honoré Oursel est capitaine de remorqueur à la compagnie fluviale HPLM [1].

En 1936 et jusqu’au moment de son arrestation, il est domicilié impasse Desrues à Villeneuve-le-Roi [2] (94) ; en 1936, il est marinier pour les Sablières de la Seine ; il héberge sa belle-mère, Alphonsine Finon, 77 ans, née en 1859.

Sous l’occupation, Honoré Oursel est marinier, passeur à l’ancien pont de Villeneuve-Saint-Georges [3].

C’est un militant communiste « acharné », selon la police française.

Il reste actif dans la clandestinité, profitant « de sa fonction de passeur pour faire passer [sic] les mots d’ordre parmi les ouvriers empruntant son bateau » (selon la police). Au début d’août 1940, il grave une faucille et un marteau sur la proue de son embarcation.

Fin août, il participe à « la deuxième réunion communiste » dans les fouilles [4] Morillon [5], derrière l’école Paul Bert.

Le 6 octobre 1940, le commissaire de police d’Athis-Mons remplit la « notice individuelle à établir au moment de l’arrestation » ; un formulaire sur lequel le « résumé des motifs… » est déjà complété avec l’activité de militant citée ci-dessus.

Le 13 octobre, Honoré Oursel est arrêté sur décision du préfet de Seine-et-Oise (l’arrêté étant daté du 12 octobre), puis interné administrativement au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé ce même mois dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt afin d’y enfermer des hommes connus de la police pour avoir été militants communistes avant-guerre.

Entrée du centre de séjour surveillé d’Aincourt Tel qu’il est photographié, le pavillon Adrien Bonnefoy Sibour ne laisse pas entrevoir la grande forêt qui l’entoure et l’isole de la campagne environnante. Droits réservés.

Entrée du centre de séjour surveillé d’Aincourt Tel qu’il est photographié, le pavillon Adrien Bonnefoy Sibour ne laisse pas entrevoir la grande forêt
qui l’entoure et l’isole de la campagne environnante. Droits réservés.

Conçus à l’origine pour 150 malades, les locaux sont rapidement surpeuplés : en décembre 1940, on compte 524 présents, 600 en janvier 1941, et jusqu’à 667 au début de juin.

Le 22 décembre, l’épouse d’Honoré Oursel écrit au préfet de Seine-et-Oise en débutant par une argumentation peu usitée : « …il serait beaucoup mieux à son travail, qu’il ne demande qu’à reprendre bien tranquille, que de perdre tout ce temps là-bas. De plus, il est de ce fait à la charge de l’État, au lieu de se subvenir à lui-même et à ceux des siens comme moi, par exemple, sa femme, et ma mère, qui a 71 ans. Je suis, dans ce cas, obligée de vous demander pour elle et pour moi l’indemnité qui nous est due… », ajoutant « et qui pourrait s’éviter en me rendant mon mari… ». Elle conclue en espérant du préfet qu’il fasse « tout le nécessaire pour [lui] rendre son mari bien innocent ».

Le 29 décembre, attendant la visite autorisée de deux proches, Adrienne et Maurice [?], Honoré Oursel rédige un courrier destiné à « ses chers cousins », auxquels il écrit : « …je suis sous les verrous depuis le 13 octobre, arrêté comme individu dangereux à la sécurité de la France. Ça peut paraître drôle, mais c’est comme cela ». Cette lettre, il prévoit de la « faire passer par Maurice, car elle ne passerait peut-être pas à la censure ». En effet, son contenu est très politique : « …chaque jour qui passe nous apporte la victoire. Le capital pourri est ébranlé et, quoi qu’il fasse, il est condamné à mort… ». Il y décrit également la situation des internés et la perception qu’ils en ont : « …nous sommes enfermés dans un sana [sanatorium]sans feu [sans chauffage]. Nous sommes gardés par des mobiles ; ils sont presque tous habillés dans une peau [de mouton, pour avoir moins froid lors de leur surveillance à l’extérieur] » ; « Ici, nous sommes comme otages. C’est-à-dire qu’au premier choc du dehors, c’est sur nous qu’ils essaieront leurs armes et leurs vengeance. Mais nous sommes bien décidés à vendre notre peau très cher, quoi qu’il arrive ». Finalement, cette lettre est interceptée par l’administration du camp et devient une preuve à charge contre Honoré Oursel. Le 14 janvier 1941, celui-ci est puni de deux jours de cellule « pour avoir transmis frauduleusement une lettre […] où il attaque la garde mobile » [sic] (la mention que les gardiens sont « habillés dans une peau ») ; accusation formulée également ainsi : « pour avoir tenu des propos incorrects sur la gendarmerie ».

Selon le commissaire de police spécial qui dirige le camp, Honoré Oursel, ayant « mauvais esprit », est « un des éléments les plus dangereux » séjournant au camp.

Le même jour, le commandant du camp envoie au préfet un courrier dans lequel il formule un avis défavorable à l’égard de la libération du militant, en y joignant pour preuve la lettre interceptée le 29 décembre.

Le 27 janvier, le secrétaire général pour la Police de Seine-et-Oise, lui, transmet au préfet un avis favorable, en expliquant que, s’il s’agit d’un militant notoire, il « ne doit pas être considéré comme particulièrement dangereux, se bornant surtout à faire des déclamations à tendance communiste. Étant donné le calme qui règne actuellement parmi les ex-militants communistes, il semble que la libération d’Oursel peut être admise, son séjour de trois mois au camp d’Aincourt n’ayant pu que l’inciter à se tenir tranquille à l’avenir. ».

Le 29 janvier, à la demande du préfet, le commissaire de police d’Athis-Mons convoque Alphonsine Oursel pour lui notifier le rejet de la demande de libération de son mari.

Le 26 février, celle-ci réitère sa demande au préfet, évoquant alors une dénonciation par lettre anonyme. Le 23 mars, par l’intermédiaire du commissaire de police, le préfet lui fait connaître que cette deuxième demande est classée sans suite et qu’il est « inopportun de faire de nouvelles demandes de libération étant donné qu’une révision trimestrielle » se fait désormais dans tous les cas d’internement.

Mais la révision du 6 mars, opérée par le chef de camp, renvoyait à son propre rapport du 14 janvier et, le 26 avril, sans nouvelle investigation, le préfet décide du maintien au camp de l’interné.

Le 4 mai, Honoré Oursel écrit au président de la délégation spéciale de Villeneuve-le-Roi – nommée par le préfet afin de remplacer la municipalité déchue : « Depuis bientôt sept mois, le linge que [ma femme] m’a envoyé est dans état d’usure complet et elle est dans l’impossibilité de le renouveler. Beaucoup de municipalités envoient à leurs administrés les effets et vêtements dont ils ont besoin. Je pense, Monsieur le Président, qu’il vous est possible de suivre cet exemple… ». Le 13 mai, l’édile transfère cette demande au préfet de Seine-et-Oise en lui rappelant qu’il a transmis trois demandes semblables cinq jours plus tôt en le priant de bien vouloir lui « indiquer la marche à suivre pour donner satisfaction aux intéressés »

Le 27 juin, Honoré Oursel fait partie d’un groupe de 88 internés communistes de Seine-et-Oise – dont 32 futurs “45000” – remis aux “autorités d’occupation” et conduits à l’Hôtel Matignon, à Paris, – alors siège de la Geheime Feldpolizei – où ils sont rejoints par d’autres détenus, arrêtés le même jour et les jours suivants dans le département de la Seine [6]. Tous sont ensuite menés au Fort de Romainville (sur la commune des Lilas – 93), élément du Frontstalag 122. Considérés comme étant en transit, ils ne sont pas enregistrés sur les registres du camp [7].

Trois jours plus tard, les hommes rassemblés sont conduits à la gare du Bourget (Seine / Seine-Saint-Denis) et transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager). Pendant la traversée de la ville, effectuée à pied entre la gare et le camp, la population les regarde passer « sans dire un mot, sans un geste. Tout à coup nous entonnons La Marseillaise et crions “Des Français vendus par Pétain” » [8]. Ils sont parmi les premiers détenus qui inaugurent ce camp créé pour les « ennemis actifs du Reich ».

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne, futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ; à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8. Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Le quartier “A” de la caserne de Royallieu à Compiègne,
futur “camp des communistes” du Frontstalag 122 ;
à droite, sont visibles les bâtiments A4, A5, A6, A7 et A8.
Carte postale des années 1930. Collection Mémoire Vive.

Dix mois plus tard, le 5 mai 1942, le préfet de Seine-et-Oise transmet au Conseiller supérieur d’administration de guerre [sic] de la Feldkommandantur de Saint-Cloud une liste d’anciens internés d’Aincourt à la libération desquels il donne un avis défavorable – « renseignements et avis formulés tant par [ses] services de police que par le directeur du centre de séjour surveillé » ; liste accompagnée de “notes” individuelles avec copie traduite en allemand, dont celle concernant Honoré Oursel.

Entre fin avril et fin juin, celui-ci est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne, installés sur une voie de la gare de marchandise d’où sont partis les convois de déportation. © Cliché M.V.

Les deux wagons à bestiaux du Mémorial de Margny-les-Compiègne,
installés sur une voie de la gare de marchandise
d’où sont partis les convois de déportation. © Cliché M.V.

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet, Honoré Oursel est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45942 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz lors de l’évacuation du camp en janvier 1945. Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz
lors de l’évacuation du camp en janvier 1945.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Honoré Oursel.Il meurt à Auschwitz le 17 août 1942, selon le registre d’appel (Stärkebuch) et l’acte de décès établis par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [9].

Après la guerre, le conseil municipal de Villeneuve-le-Roi donne son nom à une des rues de la commune.

Son fils, Maurice Armand Oursel décède le 8 mars 1957 à Réau, âgé de 47 ans.

Adrienne Oursel, veuve d’Honoré, décède le 20 octobre 1990, dans sa centième année, à Villeneuve-Saint-Georges.

Notes :

[1]  La compagnie Fluviale HPLM: la Compagnie Générale de Navigation, du Havre à Paris, Lyon et la Méditerranée. Compagnie de transport fluvial, issue de la fusion de deux compagnies, qui a régné sur les rivières et canaux de 1850 à 1972.

[2] Villeneuve-le-Roi : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine-et-Oise (transfert administratif effectif en janvier 1968).

[3] L’ancien pont : peut-être l’ancien pont suspendu construit par Marc Seguin et frères en 1843 et démonté en 1939…

[4] Fouilles : ici, lieu d’extraction de sable et de gravier dans la plaine alluviale de la Seine, créant des bassins et canaux.

[5] Morillon Corvol : entreprise créé en 1884 par MM. Morillon et Corvol pour la production de granulats quand se développent les constructions en ciment et béton. Devenue Entreprise Morillon-Corvol-Courbot (EMCC), filiale du groupe RMC France à partir de 1982, lui-même acheté par CEMEX, groupe mexicain, en mars 2005).

[6] Les 88 internés de Seine-et-Oise. Le 26 juin 1941, la Feldkommandantur 758 de Saint-Cloud transmet au préfet du département de Seine-et-Oise – « police d’État » -, cinq listes pour que celui-ci fasse procéder le lendemain à l’arrestation de ressortissants soviétiques ou de nationalité russe ancienne ou actuelle, dont 90 juifs, et de républicains espagnols en exil, soit 154 personnes. La sixième catégorie de personnes à arrêter doit être constituée de « Différents communistes actifs que vous désignerez » (aucune liste n’étant fournie). Tous doivent être remis à la Geheime Feldpolizei, à l’Hôtel Matignon, à Paris.

Si aucun autre document n’atteste du contraire, c’est donc bien la préfecture de Seine-et-Oise qui établit, de sa propre autorité, une liste de 88 militants communistes du département à extraire du camp d’Aincourt.

Le 27 juin, le commandant du camp écrit au préfet de Seine-Et-Oise pour lui « rendre compte que 70 internés[du département] ont été dirigés aujourd’hui dans la matinée sur le commissariat central de Versailles et que 18 autres internés ont été dirigés dans le courant de l’après-midi à l’Hôtel Matignon à la disposition des Autorités allemandes d’occupation. Le départ de ces internés s’est déroulé sans incident. » Les listes connues à ce jour ne distinguent pas les deux groupes et réunissent les 88 internés.

Le 29 juin, l’inspecteur de police nationale commandant l’escorte conduisant le contingent de 70 détenus à Versailles, rend compte que le commissaire divisionnaire lui a ordonné de poursuivre son convoyage « jusqu’à l’Hôtel Matignon, à Paris, siège de la Geheime Feldpolizei. En passant à Billancourt, quelques internés du premier car ont montré le poing et des ouvriers qui allaient prendre leur travail ont répondu par le même geste. J’ai immédiatement donné des ordres aux gardiens pour que les internés rentrent leurs bras.

À mon arrivée à Paris, je me suis trouvé en présence d’une quinzaine de cars remplis de prisonniers ayant la même destination que les internés d’Aincourt et j’ai dû prendre la suite.

Le formalités d’immatriculation étant assez longues, j’ai dû attendre mon tour ; l’opération a commencé à 18 heures et s’est terminée à 19h15 ; je n’ai pu faire la remise que de 38 internés sur 88 venus d’Aincourt. En raison de l’heure, le chef de bureau de la Feldpolizei m’a fait savoir qu’il recommencerait l’immatriculation le lendemain matin à 8h15, d’avoir à revenir à cette heure-là. J’ai rassemblé les 50 internés restant dans les deux cars et ai libéré les camionnettes et les gardiens disponibles.

Je me suis aussitôt mis en rapport avec la préfecture de Seine-et-Oise afin de savoir où je devais conduire, pour passer la nuit, les 50 internés. Une heure après, je recevais l’ordre de les conduire au Dépôt, 4 quai de l’Horloge, et de continuer ma mission le lendemain matin. Cette formalité étant remplie, j’ai renvoyé les cars et le personnel à Versailles.

Le 28 juin, à 7 heures, j’ai continué ma mission qui a pris fin à 11 heures. Cette escorte s’est déroulée sans autre incident. »

[7] Arrestations de la fin juin 1941 dans le département de la Seine, témoignage d’Henri Rollin : «  Le 27 juin 1941, vers 6 heures de matin, ma femme et moi nous sommes réveillés par un coup de sonnette. Trois inspecteurs de la police française viennent nous arrêter ; perquisition rapide sans résultat (nous avions la veille au soir distribué les derniers tracts que nous avions). Nous arrivons à l’hôtel Matignon où nous trouvons de nombreux cars et camions, résultat d’une rafle dans toute la région parisienne. Nous sommes remis par la police française aux autorités allemandes. Au moment de ma remise aux Allemands, j’ai aperçu qu’on leur donnait une petite fiche portant mon nom et la mention «  communiste  », soulignée à l’encre rouge. Nous subissons un court interrogatoire d’identité… Attente… Vers la fin de l’après-midi, départ en car. Arrivée au fort Romainville, fouille, identité. Départ de Romainville le 1er juillet, au matin, par train spécial et bondé au Bourget, arrivée l’après-midi à Compiègne. Le lendemain, même cérémonie, refouille et identité, ensuite la vie de camp… »

[8] De l’Hôtel Matignon au Frontstalag 122 : témoignage de Marcel Stiquel (déporté au KL Sachsenhausen le 24 janvier 1943). Son récit fait état de 87 internés (la liste en comporte 88) et d’un départ d’Aincourt étalé sur deux jours : les 27 et 28 juin 1941 (voir note ci-dessus).

[9] Différence de date de décès avec celle inscrite au Journal Officiel : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – s’appuyant sur le ministère des Anciens combattants qui avait collecté le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. S’agissant d’Honoré Oursel, c’est le 15 janvier 1943 qui a été retenu pour certifier son décès (9-05-1946). La parution au J.O. rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 389 et 415.
- Sachso, Amicale d’Orianenburg-Sachsenhausen, Au cœur du système concentrationnaire nazi, Collection Terre Humaine, Minuit/Plon, réédition Pocket, mai 2005, page 36 (sur le transfert depuis Aincourt des 88 de Seine-et-Oise, fin juin 1941).
- Gérard Bouaziz, La France torturée, collection L’enfer nazi, édité par la FNDIRP, avril 1979, page 262 (sur les arrestations du 27 juin 1941).
- Archives départementales de l’Eure, archives en ligne : état civil de Criquebeuf-sur-Seine, registre des naissances de l’année 1888 (8 Mi 4742), acte n°13 (vue 519/548).
- Archives communales de Villeneuve-le-Roi, recherches de Stéphanie Guérin (01-2007).
- Archives départementales des Yvelines et de l’ancien département de Seine-et-Oise (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt, relations avec les autorités allemandes (1W80), dossier individuel (1W144), (1W277).
- Liste des 88 internés d’Aincourt (domiciliés dans l’ancien département de Seine-et-Oise) remis les 27 juin 1941 à la disposition des autorités d’occupation, et liste Internés de Seine-et-Oise à la suite d’une mesure prise par le préfet de ce département, ayant quitté le centre d’Aincourt, copies de documents des AD 78 communiquées par Fernand Devaux (03 et 11-2007).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 894 (21460/1942).
- Simone Oursel, sa petite-fille (messages 01-2018).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 21-09-2023)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP (Fédération Nationale des Déportés et Internés Résistants et Patriotes) qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.