Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.  Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Les SS ont détruit la plupart des archives du KL Auschwitz.
Le portrait d’immatriculation de ce détenu a disparu.

Maurice, Denis, Penverne naît le 24 mars 1920 à Paris à la “clinique d’accouchement” – devenue hôpital Garnier rattaché à Cochin – du 89 rue d’Assas à Paris 6e, fils de Joseph Penverne, 44 ans, journalier (terrassier), et d’Anne Marie Duverger, 40 ans, son épouse, demeurant au 22 rue de Lourmel à Paris 15e. Maurice a (au moins) deux frères, Alexandre Joseph, né 2 octobre 1903, et Georges Vincent, né le 9 mars 1910.

De novembre 1936 a septembre 1939, Maurice Penverne est employé comme tourneur sur métaux aux Usines de Mécanique générale, 13 rue du Mont-Valérien à Puteaux (Seine / Hauts-de-Seine). Puis il est inscrit au fonds du chômage du 15e arrondissement, jusqu’en mai 1940.

De la classe 1940, du recrutement de la Seine (2e bureau), il effectue un stage dans un camp de jeunesse à la fin de l’année 1940. Puis il trouve du travail dans plusieurs chantiers de la région parisienne et de province, et notamment à Montdésir (Seine-et-Oise / Essonne), aérodrome militaire d’Étampes, où il travaille « pour le compte des autorités allemandes ».

Il est fiancé à Madeleine A., née en 1923 (Seine), domiciliée chez ses parents, 7 rue Jean Perrin à Saint-Ouen (Seine / Seine-Saint-Denis), et dont le père est manœuvre à la T.C.R.P.

Au moment de son arrestation, Maurice Penverne habite toujours chez ses parents.

Le 23 mars 1941, il est arrêté par les services du commissariat de police du quartier de Grenelle, étant trouvé en possession d’un tract communiste intitulé « L’Allemagne exige le retour de Laval au Pouvoir », qu’il déclare avoir trouvé dans le train en rentrant de son travail. Conduit au Dépôt de la préfecture de police sous l’inculpation d’infraction au décret-loi du 26 septembre 1939, il est mis à la disposition du Parquet. Une perquisition effectuée à son domicilie le jour même se révèle infructueuse. Dès le lendemain, 24 mars, il est relaxé sans jugement… « après avoir été au préalable signalé aux services de Police allemands ».

Ultérieurement, les Renseignements généraux noteront à son sujet : « Dans son entourage, Penverne n’est pas représenté comme un militant révolutionnaire convaincu, mais tout au plus comme un sympathisant qui a eu le tort de fréquenter des jeunes éléments douteux de son quartier. Il appartient à une bonne famille et il semble pas qu’on puisse le considérer comme dangereux ».

Le 22 mars 1942, il est signalé par les Autorités allemandes sur une liste d’ouvriers suspectés de se livrer à la propagande communiste.

Le 28 avril 1942, Maurice Penverne est arrêté à son domicile par des policiers français et des Feldgendarmes, comme otage, lors d’une grande vague d’arrestations (397 personnes) organisée dans le département de la Seine par les « autorités d’occupation », avec le concours de la police française et visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin ayant précédemment fait l’objet d’une poursuite policière ou judiciaire et ayant été libérés, soit après avoir bénéficié d’un non-lieu, d’un acquittement ou d’un sursis, soit après avoir fini de purger une courte peine, parmi lesquels beaucoup de jeunes gens. Les hommes arrêtés sont rapidement conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”, désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”. À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp. Carte postale. Collection Mémoire Vive.

La caserne de Royallieu après-guerre. Les huit premiers bâtiments alignés à gauche sont ceux du quartier “A”,
désigné pendant un temps comme le “camp des communistes”.
À l’arrière plan à gauche, sur l’autre rive de l’Oise, l’usine de Venette qui fut la cible de plusieurs bombardements avec “dégâts collatéraux” sur le camp.
Carte postale. Collection Mémoire Vive.

Entre fin avril et fin juin 1942, Maurice Penverne est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, Maurice Penverne est dans la moitié des déportés du convoi ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « ARBEIT MACHT FREI » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Pendant un temps, il est assigné au Block 6.

Du 16 au 31 septembre il est admis au Block 20 de l’ “hôpital” des détenus (Revier [1]), son nom étant orthographié « Penwerne ».
Le 8 décembre 1942, Maurice Penverne entre de nouveau au Revier d’Auschwitz-I, mais on ignore la date exacte de son décès ; certainement avant la mi-mars 1943 [2].

Il est homologué comme “Déporté politique”. La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 19-02-1997).

Notes :

[1] Revier, selon Charlotte Delbo : « abréviation de Krakenrevier, quartier des malades dans une enceinte militaire. Nous ne traduisons pas ce mot que les Français prononçaient révir, car ce n’est ni hôpital, ni ambulance, ni infirmerie. C’est un lieu infect où les malades pourrissaient sur trois étages. ». In Le convoi du 24 janvier, Les Éditions de Minuit, 1967, p. 24. Le terme officiel est pourtant “hôpital” ; en allemand Häftlingskrakenbau (HKB), hôpital des détenus ou Krakenbau (KB). Dans Si c’est un Homme, Primo Lévi utilise l’abréviation “KB”.

[2] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil… Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. S’agissant de Maurice Penverne, c’est « le 11 juillet 1942 à Auschwitz (Pologne) et non en juillet 1942 à Compiègne (Oise) » qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 373 et 416.
- Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” de Paris (2002), citant : Bureau des archives des victimes des conflits contemporains (BAVCC), ministère de la Défense, Caen (fichier central) – Témoignage de Fernand Devaux, rescapé du convoi (décembre 1985).
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, Le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”  (BA ?) ; dossier individuel au cabinet du préfet (1 W 638-19895).
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Bureau d’information sur les prisonniers, registres du HKB (message du 3-04-2009).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 2-03-2024)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.