Henri, Louis (?), Creutzer naît le 8 mai 1906 à Fontoy (Moselle), fils de Louis Creutzer et Léonie Martin. Il a une sœur, Louise, Amélie, née en 1911.
Henri Creutzer commence à travailler comme aide-forgeron.
Le 12 mai 1926 (du bureau de recrutement de Thionville (57), il est incorporé comme soldat de 2e classe au 110e régiment d’infanterie afin d’accomplir son service militaire. Le 5 novembre 1927, il est renvoyé dans ses foyers et se retire à Thionville, titulaire d’un certificat de bonne conduite.
Pendant un temps, il habite à Potigny (Calvados), puis à Giraumont (Meurthe-et-Moselle – 54).
Au moment de son arrestation, il est domicilié au 495, rue de Verdun à Mancieulles (54), dans le bassin minier de Briey. Comme réserviste, il effectue encore plusieurs périodes d’instruction militaire : du 12 août au 2 septembre 1932 au camp de Mourmelon-le-Grand, du 3 au 17 juin 1935 au camp d’Angevillers (Moselle), du 25 septembre au 2 octobre 1938.
Il est célibataire.
Henri Creutzer est manœuvre à la mine de Mancieulles.
- Mancieulles. Ensemble des puits d’extraction de la Société
anonyme des mines de fer de Saint-Pierremont.
Carte postale des années 1900. Coll. Mémoire Vive.
Le 15 juillet 1941, le préfet signe un arrêté ordonnant son internement administratif à la Maison d’arrêt de Briey à la suite d’une distribution de tracts communistes dans son secteur d’habitation (il y est gardé quinze jours).
Dans la nuit du 4 au 5 février 1942, un groupe de résistance communiste mène une action de sabotage contre le transformateur électrique de l’usine sidérurgique d’Auboué qui alimente également dix-sept mines de fer du Pays de Briey. Visant une des sources d’acier de l’industrie de guerre allemande (Hitler lui-même s’en préoccupe), l’opération déclenche dans le département plusieurs vagues d’arrestations pour enquête et représailles qui concerneront des dizaines de futurs “45000”.
Le nom d’Henri Creutzer figure – n°41 – sur une « liste communiquée le 19 (février ?) au soir à la KK (Kreiskommandantur) de Briey par le sous-préfet » afin de préciser la nationalité de cinquante-trois hommes.
Lors de la « rafle effectuée dans la nuit du 19 au 20 » février, Henri Creutzer est arrêté comme otage, en même temps qu’Angel Bolognini, de Mancieulles (rapport du préfet de la région de Nancy).
Dès le 20 février, Henri Creutzer fait partie d’un groupe d’otages transférés par la police allemande au camp français d’Écrouves, près de Toul (54), en attente « d’être dirigés sur un autre camp sous contrôle allemand en France ou en Allemagne ».
Et, effectivement, le 5 mars, Henri Creutzer est parmi les trente-neuf détenus transférés au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 -Polizeihaftlager).
Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, Henri Creutzer est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 45413 selon les listes reconstituées (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.
Le 13 juillet, après l’appel du soir – l’ensemble des “45000” ayant passé cinq jours à Birkenau -, une moitié des membres du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I). Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Henri Creutzer.
Il meurt à Auschwitz le 20 octobre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).
Sources :
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 74, 367 et 400.
Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, éditions Graphein, Paris nov. 2000, page 117.
Laurent Delayen, son arrière-petit-neveu (messages 12-02-2008 et 02-2019), copie du livret militaire.
Archives Départementales de Meurthe-et-Moselle, Nancy : cotes W1304/23 et WM 312 ; fiches du centre de séjour surveillé d’Écrouves (ordre 927 W) ; recherches de Daniel et Jean-Marie Dusselier.
Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 187 (36882/1942).
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 1-03-2019)
Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous dispose (en indiquant vos sources).
En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.