Henri Peiffer naît le 1er février 1910 à Russange, en Moselle annexée par le Reich allemand, à la frontière avec le Luxembourg.
Le 31 mars 1930, à Villerupt, il se marie avec Peppina Violanda Pepoli, née en 1912 à Zurich. Ils ont une fille, Huguette Lydia Bernadette, née le 25 octobre 1930, et un fils, Albert Francis Rodolphe, né le 8 décembre 1931, tous deux à Villerupt.
En 1931 et jusqu’au moment de son arrestation, Henri Peiffer est domicilié rue des Acacias à Villerupt (Meurthe-et-Moselle – 54), ville-frontière avec le Luxembourg.
Henri Peiffer est ajusteur à l’usine sidérurgique de Micheville, lieu-dit de Villerupt.
Sous l’occupation, il facilite l’entrée en France de prisonniers de guerre évadés.
Les conditions de son arrestation et son trajet en détention restent à préciser.
Il est probablement arrêté comme otage à la suite du sabotage, dans la nuit du 4 au 5 février 1942, du transformateur électrique de l’usine sidérurgique d’Auboué qui alimente également 17 puits de mine (fer) du bassin de Briey ; action de résistance qui déclenche une vague d’arrestations dans le département (70, dont plusieurs dizaines de futurs “45000”) ; à vérifier…
Il est finalement interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).
Entre fin avril et fin juin 1942, Henri Peiffer est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Tergnier, Laon, Reims… Châlons-sur-Marne : le train se dirige vers l’Allemagne. Ayant passé la nouvelle frontière, il s’arrête à Metz vers 17 heures, y stationne plusieurs heures, puis repart à la nuit tombée. Francfort-sur-le-Main (Frankfurt am Main), Iéna, Halle, Leipzig, Dresde, Gorlitz, Breslau… puis la Pologne occupée. Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, Henri Peiffer est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45956 (ce matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard)
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.
Le 13 juillet, après l’appel du soir, Henri Peiffer est dans la moitié des déportés du convoi sélectionnés pour rester dans ce sous-camp, alors que les autres sont ramenés à Auschwitz-I.
Comme il parle couramment l’allemand, il est désigné comme secrétaire (Blockschreiber) du Block 10 : son rôle est de tenir à jour la liste des détenus.
Henri Peiffer contracte le typhus et est conduit au Block 12, une des baraques en bois servant d’hôpital (Revier, HKB) dans le secteur BI-b de Birkenau : le 17 novembre 1942, dans la chambre n° 5 – où se trouvent également René Pignet et Alexandre Varoteau -, il reçoit quarante gouttes de valériane.
Le 25 décembre, depuis une fenêtre de son Block, il est témoin d’un massacre de détenus. Sorti du Revier le lendemain, il assiste à l’incinération de leurs cadavres sur des foyers aménagés dans la sapinière de Birkenau.
Dans cette période, il est convoqué à la Politische Abteilung qui l’averti que sa mère demande de ses nouvelles et qu’il doit lui écrire afin de la rassurer (elle a obtenu ce “privilège” en tant que Lorraine mariée en secondes noces à un Autrichien).
Au début de 1943, la Gestapo du camp lui ordonne d’envoyer une lettre de condoléances à sa mère pour la mort de son beau-père à Stalingrad.
Enfin, quand sa femme lui demande pourquoi un de ses camarades n’a pas écrit chez lui, il répond après en avoir délibéré avec ses camarades : « Je ne savais pas que X était décédé. » ; espérant ainsi faire comprendre que l’absence de lettre signifiait la mort du détenu.
Le 17 ou 18 mars 1943, il fait partie des dix-sept “45000” rescapés de Birkenau conduits à Auschwitz-I (en tout, 24 survivants sur 600 !).
À la mi-août 1943, Henri Peiffer est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) au premier étage du Block 11, la prison du camp, pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.
Le 12 décembre 1943, à la suite de la visite d’inspection du nouveau commandant du camp, le SS-Obersturmbannführer Arthur Liebehenschel, et après quatre mois de ce régime qui leur a permis de retrouver quelques forces, ils sont pour la plupart renvoyés dans leurs Blocks et Kommandos d’origine.
Le 3 août 1944, Henri Peiffer est parmi les trois-quarts des “45000” présents à Auschwitz qui sont de nouveau placés en “quarantaine” en préalable à un transfert.
Le 28 août 1944, il est dans le petit groupe de trente-et-un détenus dont vingt-neuf “45000”) transférés au KL [1] Flossenbürg (Haut-Palatinat bavarois, proche de la frontière tchèque) et enregistrés dans ce camp le 31 août.
Le 29 octobre, Henri Peiffer est parmi les onze “45000” transféré à Wansleben (Kommando de Buchenwald), une usine de potasse. Là, il est chef de la chambrée des Français.
Le 12 avril 1945, il est dans une des colonnes de détenus évacués de ce camp à marche forcée vers le Nordde Halle. Henri Peiffer est libéré le 14 ou 15 avril 1945 entre les villages de Quellendorf et Hinsdorf, avec neuf autres “45000”.
Le 3 juillet 1945, il écrit à Flora Pignet pour lui dire le peu qu’il sait du sort de son mari, Ernest, et de son fils René, morts à Auschwitz.
Henri Peiffer décède le 30 août 1993.
Notes :
[1] KL : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.
Sources :
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 251, 346 et 347, 359, 369 et 416.
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 14-04-2009)
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En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.