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IDENTIFICATION INCERTAINE…
Auschwitz-I, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oświęcim, Pologne.
Coll. Mémoire Vive. Droits réservés.

Hilaire Sartorio naît le 2 janvier 1899 à Paris 19e arrondissement, chez ses parents, Emmanuel Sartorio, 41 ans, fumiste, et Victorine Clotilde Marie Morel, 37 ans, blanchisseuse, domiciliés au 13, rue Riquet. Tous deux seront décédés au moment de son arrestation.

Le 10 février 1907, son père, devenu chaudronnier, âgé de 49 ans, décède au domicile familial, alors au 5, rue Riquet.

Resté auprès de sa mère, Hilaire Sartorio commence à travailler comme chaudronnier en fer.

À partir du 19 avril 1918, il est incorporé comme soldat de 2e classe au 10e régiment d’infanterie. Le 30 juillet 1919, il passe au 16e régiment de chasseurs à cheval. Le 9 juin 1920, il est nommé cavalier de 1ère classe. Le 9 juin 1920, il passe au 85e régiment d’artillerie lourde. Le 21 mars 1921, il est renvoyé dans ses foyers, titulaire d’un certificat de bonne conduite.

Au printemps 1922, Hilaire Sartorio vit toujours rue Riquet avec sa mère et son frère ou son oncle (?) Henri, lui aussi chaudronnier.

Le 24 juin 1922 à la mairie du 19e arrondissement, Hilaire Sartorio se marie avec Sylvie Françoise Hortense Thienpont, née le 7 février 1904 à Paris 19e. Ils ont un fils, Georges, né le 22 mars 1923, à Paris 19e.

La famille s’installe au 6, rue de Thionville, à Paris 19e ; au moins jusqu’au printemps 1936.

Le 1er février 1925 en soirée, la mère d’Hilaire décède à son domicile.

Hilaire Sartorio est chaudronnier à la Compagnie du Gaz de Paris, dans une usine sise 222, rue d’Aubervilliers à Paris. Il est adhérent au Syndicat général unitaire du personnel de la Société du Gaz de Paris.

Le 8 août 1927, place du Combat (colonel Fabien), lors d’une ample manifestation pour sauver Sacco et Vanzetti de la chaise électrique [1], Hilaire Sartorio est arrêté par des gardiens de la Paix du commissariat de police de l’hôpital Saint-Louis avec trois autres ouvriers – dont deux de la Compagnie du Gaz – « pour violences et outrages, […] entraves à la liberté du travail » ; Hilaire Sartorio aurait frappé un agent de coups de poing au visage. Il est conduit au dépôt de la préfecture de police, sous le Palais de Justice. Deux jours plus tard, le 10 août, la 11e chambre du tribunal de police correctionnelle de la Seine le condamne à 25 jours de prison avec sursis pour rébellion à agents (ce qui entraîne sa rétrogradation au titre de soldat de 2e classe dans l’année de réserve).

Le 15 décembre 1932, lors d’une tentative de manifestation des employés des services publics place de l’Opéra, il est de nouveau appréhendé, mais sans aucune suite judiciaire.

À un date restant à préciser, il adhère au Parti communiste comme membre du rayon du 20e arrondissement de la région de Paris-Ville.

Au moment de son arrestation, Hilaire Sartorio habite au 28, rue du Poitou au Vert-Galant, quartier de lotissement de Tremblay-lès-Gonesse, devenu Tremblay-en-France [2] (Seine / Seine-Saint-Denis).
Sous l’occupation, la police française le désigne comme un « ami intime de l’ex-conseiller municipal [de Paris 19e, quartier du Pont de Flandre] Corentin Cariou ; meneur très actif, principal animateur de la propagande communiste auprès du personnel de la Société du Gaz » « (diffuse) des tracts à l’usine (…) et (fait) des collectes au profit des emprisonnés politiques – (est) chargé de recueillir les fonds des ex-membres de la cellule des Goudrons ».

Le 6 décembre 1940, Hilaire Sartorio est appréhendé sur son lieu de travail – alors à l’usine des goudrons au 15, rue de Cambrai, à Paris 19e – par des agents du commissariat de quartier du Pont de Flandre lors d’une vague d’arrestations visant 69 hommes dans le département de la Seine. Les arrêtés d’internement ont été pris par le préfet de police.

D’abord rassemblés à la caserne des Tourelles, boulevard Mortier à Paris 20e, les hommes appréhendés sont – le jour même – internés administrativement au “centre de séjour surveillé” (CSS) d’Aincourt (Seine-et-Oise / Val-d’Oise), créé deux mois plus tôt dans les bâtiments réquisitionnés d’un sanatorium isolé en forêt afin d’y enfermer des hommes connus de la police pour avoir été militants communistes avant-guerre. Un autre gazier et futur “45000”, Maurice Rat, est arrêté et interné le même jour.

Aincourt. Le sanatorium de la Bucaille. Au premier plan,  le pavillon qui fut transformé en camp d’internement.  Carte postale oblitérée en 1958. Coll. Mémoire Vive.

Aincourt. Le sanatorium de la Bucaille. Au premier plan, le pavillon qui fut transformé en camp d’internement.
Carte postale oblitérée en 1958. Coll. Mémoire Vive.

À une date qui reste à préciser, le préfet de Seine-et-Oise écrit au préfet de police à Paris afin de « régulariser » la situation de six internés du camp d’Aincourt précédemment domiciliés dans son département, dont Hilaire Sartorio. Il lui propose de « prendre des arrêtés d’élargissement, qui resteraient théoriques, n’étant suivis d’aucun effet, et [qu’il compléterait] immédiatement à la même date par des arrêtés d’internement » qu’il signerait lui-même.

Le 6 septembre 1941, Hilaire Sartorio fait partie d’un groupe de 150 détenus d’Aincourt (dont 106 de la Seine) transférés au camp français (CSS) de Rouillé, au sud-ouest de Poitiers (Vienne), pour l’ouverture de celui-ci.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue. Au fond - de l’autre côté de la voie ferrée -, le village. Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le camp de Rouillé, “centre de séjour surveillé”, vu du haut d’un mirador. Date inconnue.
Au fond – de l’autre côté de la voie ferrée -, le village.
Musée de la Résistance nationale (Champigny-sur-Marne), Fonds Amicale Voves-Rouillé-Châteaubriant. Droits réservés.

Le 22 mai 1942, Hilaire Sartorio est parmi les 155 internés – qui seront pour la plupart déportés avec lui – remis aux “autorités d’occupation” à la demande de celles-ci et conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

Entre fin avril et fin juin 1942, il est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

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Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet , Hilaire Sartorio est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) ; peut-être sous le numéro 46097, selon les listes reconstituées (la photo d’immatriculation correspondant à ce matricule a été retrouvée, mais n’a pu être identifiée à ce jour).

Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

© Mémoire Vive 2017.

© Mémoire Vive 2017.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.

Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp) ; Hilaire Sartorio se déclare alors sans religion (Glaubenslos). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.

Le 13 juillet, après l’appel du soir, une moitié des déportés du convoi est ramenée au camp principal (Auschwitz-I), auprès duquel fonctionnent des ateliers où sont affectés des ouvriers ayant des qualifications utiles au camp. Aucun document ni témoignage ne permet actuellement de préciser dans lequel des deux sous-camps du complexe concentrationnaire a alors été affecté Hilaire Sartorio.

Il meurt à Auschwitz le 2 octobre 1942, d’après l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher).

Selon la société d’études historiques de Tremblay (SEHT), un couple, Georges et Sylvie Sartorio, membres du groupe FTPF du commandant Fernand Dive (alias Gourget, grièvement blessé le 27 août 1944), du quartier du Vert-Galant à Tremblay, cachent deux aviateurs alliés.

Avant avril 1955, Sylvie Sartorio emménage au 49, avenue Louise au Blanc-Mesnil (93).

Le 22 décembre 1957, elle se remarie avec Gabriel Lajugie. Elle décède le 9 décembre 1974.

Le nom d’Hilaire Sartorio est inscrit sur le Monument aux morts de Tremblay-en-France, situé dans le cimetière communal.

La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 19-05-1998).

Notes :

[1] Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti, militants anarchistes d’origine italienne vivant aux États-Unis, inculpés de hold-up à main armée et de meurtres commis en 1919 et 1920 malgré des preuves insuffisantes, condamnés à mort en juillet 1921. Quand ce jugement est confirmé le 12 mai 1926, une mobilisation internationale est lancée afin de les sauver, notamment relayée par la section française du Secours rouge international. Les deux hommes sont exécutés sur la chaise électrique dans la nuit du 22 au 23 août 1927 à la prison de Charlestown, dans la banlieue de Boston.

[2] Tremblay-en-France : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine-et-Oise (transfert administratif effectif en janvier 1968).

Sources :

- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 387 et 420.
- Archives départementales de Paris, site internet, archives en ligne ; registre des naissances du 19e arrondissement à la date du 5-01-1899 (V4E 10591), acte n° 46 (vue 12/24).
- Archives de Paris : registres des matricules du recrutement militaire, classe 1919, 1er bureau de recrutement de la Seine, volume 1501-2000 (D4R1 2094), n° 2094.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris), Service de la mémoire et des affaires culturelles, le Pré-Saint-Gervais (Seine-Saint-Denis) : cartons “occupation allemande”,  communistes fonctionnaires internés… (BA 2214), liste des fonctionnaires internés administrativement le 6 décembre 1940, par application de la loi du 3-09-1940,  liste des internés communistes (BA 2397) ; dossier individuel au cabinet du préfet (1 W 766-30377) ; dossier individuel des Renseignements généraux (77 W 1487-24964).
- Archives départementales des Yvelines (AD 78), Montigny-le-Bretonneux : centre de séjour surveillé d’Aincourt (1w74, 1w76), dossier individuel (1w152).
- Mémorial de la Shoah, Paris, archives du Centre de documentation juive contemporaine (CDJC) : liste XLI-42, n° 166.
- Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 3, page 1067 (34023/1942).
- Site Mémorial GenWeb, 93-Tremblay-en-France, relevé d’Alain Claudeville (11-2002).

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 18-05-2021)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.