Paul, Marius, Zanzi naît le 5 avril 1906 à Anould (Vosges – 88), fils de Jean Zanzi et de Lucie Combeau.
En 1926, il s’engage ou accomplit son service militaire dans la Marine nationale à Toulon, jusqu’à être nommé quartier-maître.
Le 9 septembre 1929, à Longeville-sur-la-Laines (Haute-Marne – 52), Paul, Marius, Zanzi se marie avec Irène Marie Boucher, née le 22 novembre 1902 à Ville-en-Blaisois (52), fille d’un instituteur public.
Au printemps 1931 et jusqu’au moment de son arrestation, Marius Zanzi est domicilié au 7, rue Dauphine à Saint-Dié (88), où il gère un petit hôtel dont le rez-de-chaussée est aménagé en café-restaurant : le Zanzi-bar. Lui et son épouse y sont aidés par une bonne.
Sous l’occupation, Saint-Dié se trouve à proximité de la nouvelle frontière avec le Reich (l’Alsace étant annexée) ; parallèlement, l’ensemble de la Lorraine est une zone planifiée en recolonisation allemande à terme.
À l’automne 1940, Marius Zanzi est contacté par André Sester, de Sainte-Marguerite, commune limitrophe, responsable des groupes de jeunes du PC interdit, et par Marcel Rogé, ancien conseiller municipal communiste de Saint-Dié, afin de mettre son établissement à la disposition la résistance. Ainsi des prisonniers de guerre français évadés peuvent y faire étape quand ils passent par Saint-Dié. Son hôtel-restaurant abrite également des réunions clandestines de responsables locaux et départementaux du Parti communiste, et sert d’entrepôt de matériel d’impression (machines à polycopier, tracts…) ; sous le pseudonyme de « Paul », lui-même participe à la diffusion de propagande imprimée.
En février 1941, un inspecteur de police venu d’Épinal (Mitxler, Mistler ou Mischler ?) et se faisant passer pour un responsable communiste venu de Nancy réussit à faire bavarder un membre de son groupe…
Le 26 février, Marius Zanzi est arrêté à son domicile pour activité communiste. Il est conduit à la prison de la “Loge Blanche” dans cette ville. Dans la même affaire sont pris – entre autres – Maurice Marchal, de Sainte-Marguerite, qui sera déporté avec lui, André Sester, et Raymond Ruffet, fusillé. Le 10 mai suivant, Marius Zanzi comparaît devant le tribunal correctionnel de Saint-Dié. Le 26 juin, la cour d’appel de Nancy (Meurthe-et-Moselle – 53) le condamne à un an d’emprisonnement. Il est écroué à la Maison d’arrêt Charles III de Nancy.
Le 21 février 1942, à l’expiration de sa peine, il n’est pas libéré, mais interné le lendemain au camp français d’Écrouves, près de Toul (53), probablement à la demande des autorités d’occupation. En avril, il aide à l’évasion de Marcel Rogé et Raymond Ruffet. Le 21 mai, Marius Zanzi est transféré à Nancy, probablement en transit…
À une date restant à préciser, il est finalement interné au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager), où il est enregistré sous le matricule n° 5818.
Entre fin avril et fin juin 1942, Marius Zanzi est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, Marius Zanzi est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 46266 (ce matricule sera tatoué sur son avant-bras gauche quelques mois plus tard).
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib, le premier créé.
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.
Le 13 juillet, après l’appel du soir, Marius Zanzi est dans la moitié des déportés du convoi sélectionnés pour rester dans ce sous-camp, alors que les autres sont ramenés à Auschwitz-I.
À un moment, Marius Zanzi se trouve dans le même Kommando que David Badache, Henri Hannhart et Aimé Oboeuf : ils doivent décharger des sacs de ciment venus de Belgique et les porter jusqu’au sixième étage à l’intérieur d’un bâtiment, sous les coups de kapos polonais qui vont jusqu’à tuer quatre de leurs camarades.
À un autre moment, il a Ernest Pignet, d’Albert (Somme) pour « chef de chantier ». Mais celui-ci contracte le typhus et est gazé.
Le 17 ou 18 mars 1943, Marius Zanzi fait partie des dix-sept “45000” rescapés de Birkenau conduits à Auschwitz-I (en tout, 24 survivants sur 600 !).
En juillet 1943, la plupart des détenus “politiques” français d’Auschwitz (essentiellement des “45000”) reçoivent l’autorisation d’écrire – en allemand et sous la censure – à leur famille et d’annoncer qu’ils peuvent recevoir des colis (à vérifier le concernant…).
À la mi-août 1943, Marius Zanzi est parmi les “politiques” français rassemblés (entre 120 et 140) au premier étage du Block 11 – la prison du camp – pour une “quarantaine”. Exemptés de travail et d’appel extérieur, les “45000” sont témoins indirects des exécutions massives de résistants, d’otages polonais et tchèques et de détenus du camp au fond de la cour fermée séparant les Blocks 10 et 11.
Au début d’octobre, Marius Zanzi et Roger Pourvendier, de Caen, déclarent la malaria (ou paludisme), avec de fortes fièvres. Ils sont hospitalisés pendant environ trois semaines avant de revenir au Block 11. Mais, le 25 novembre, le commandant du camp fait recenser les détenus atteints de cette maladie pour les faire transférer au KL Majdanek, près de Lublin : les deux hommes doivent quitter leurs camarades.
Dans cet autre camp, Marius Zanzi est témoin de la mort de Roger Pourvendier le 25 janvier 1944.
Devant l’avancée des troupes soviétiques, les détenus de Majdanek qui ne sont pas massacrés sur place (mesure qui concerne essentiellement les détenus Juifs) sont évacués vers Auschwitz.
Marius Zanzi annonce alors la mort de Roger Pourvendier à l’oncle de celui-ci, Marcel Cimier.
Le 15 août, Marius Zanzi fait partie d’un groupe de détenus transférés au KL [1] Flossenbürg (matr. 17342) ; quinze jours avant que d’autres “45000” y soient conduits à leur tour. Là, il est placé au Block des contagieux. Dans cette période, il est atteint par le typhus. Le 11 octobre, il subit une fracture de la jambe dont il gardera des séquelles.
En avril 1945, il est transféré au KL Dachau.
Le camp est libéré le 29 avril par l’armée américaine. Marius Zanzi est rapatrié par Strasbourg le 17 mai suivant, et se rend d’abord à Longeville (52), où son épouse s’est peut-être réfugiée.
À son retour, il retrouve Saint-Dié « complètement incendiée », et son établissement (fermé après son arrestation) fait partie des bâtiments détruits par l’aviation alliée et la politique nazie de “terre brûlée” lors des combats de la libération à l’automne 1944. Mais ses proches sont en bonne santé. Il se réinstalle à Romilly-sur-Seine (Aube), y recréant le Zanzi-bar dans l’Hôtel central, au 30 rue Gornet-Boivin.
Le 12 mars 1946, il écrit à Flora Pignet, domiciliée à Albert (Somme) pour attester de la mort d’Ernest et René Pignet, respectivement son mari et son fils.
Le 7 septembre 1947, Marius Zanzi certifie sur l’honneur que Maurice Marchal, de Sainte-Marguerite, parti à Auschwitz à la même date que lui, « ne l’ayant pas quitté (…) il y est décédé gazé suite au typhus au commencement de l’année 1943 » ; écart temporel considérable (quatre mois) avec l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) qui a enregistré le décès de celui-ci à la date du 4 septembre 1942.
Le 22 février 1948, Marius Zanzi complète et signe un formulaire du ministère de la Défense nationale afin d’obtenir son homologation au sein de la Résistance intérieure française (RIF) pour son appartenance au mouvement Front national [2] comme agent de liaison. À l’appui de sa démarche de reconnaissance, il cite Léon Thibert, de Saint-Martin-du-Mont (Saône-et-Loire), Roger Debarre, de Quessy (Aisne), déportés avec lui, et deux autres rescapés concentrationnaires. Bien que la commission régionale d’homologation ait prononcé un avis favorable (y compris le préfet des Vosges le 23 mars 1941), la commission départementale (saisie en “appel”) rend un avis négatif le 28 juin suivant : « Non résistant, déporté politique, connu par un membre de la commission (sic) ». Sa demande est définitivement refusée par la commission nationale le 17 octobre 1951.
Le 3 octobre 1950, Marius Zanzi complète et signe un formulaire du ministère des Anciens combattants et Victimes de guerre (ACVG) pour demander que lui soit attribué le titre de déporté politique (il raye de lui-même la mention alternative « résistant »). Le 7 mai 1952, la commission départementale de l’Aube prononce un avis favorable à l’unanimité. Le 6 février 1953, le ministère des ACVG décide de lui attribuer le titre demandé, et la carte DP n° 1116.03767 lui est envoyée le 6 février 1953.
Marius Zanzi décède le 8 août 1971, âgé de 65 ans.
Irène Zanzi décède le 4 décembre 1982 à Reims.
Notes :
[1] KL : abréviation de Konzentrationslager (camp de concentration). Certains historiens utilisent l’abréviation “KZ”.
[2] Front national de lutte pour la liberté et l’indépendance de la France : mouvement de Résistance constitué en mai 1941 à l’initiative du PCF clandestin (sans aucun lien avec l’organisation politique créée en 1972, dite “FN”, jusqu’à son changement d’appellation le 1er juin 2018).
Sources :
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 89, 192, 252, 318, 346 et 348, 359, 380 et 423.
Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, éditions Graphein, Paris nov. 2000, page 460.
Division des archives des victimes des conflits contemporains (DAVCC), ministère de la Défense, direction des patrimoines de la mémoire et des archives (DPMA), Caen : dossier de ZANZI Marius (21 P 694 167).
Message de François Tomeno (01-2006).
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 05-06-2021)
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En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.