Auschwitz, le 8 juillet 1942. Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oswiecim, Pologne. Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Auschwitz, le 8 juillet 1942.
Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau,
Oswiecim, Pologne.
Collection Mémoire Vive. Droits réservés.

Roger Chaput naît le 15 octobre 1911 à Saint-Ouen [1] (Seine / Seine-Saint-Denis – 93), chez ses parents, Ernest Léon Chaput, 28 ans, paveur, et Catherine Eugénie Taupin, 27 ans, son épouse, domiciliés au 20 rue Soubise.

Début 1933, Roger Chaput habite encore chez ses parents, à la même adresse. Il travaille alors comme dessinateur.

Le 11 février 1933, à Saint-Ouen, il se marie avec Suzanne Tessier, née le 19 mars 1912 à Paris 8e. Ils ont une fille, Christiane, née le 25 novembre 1933 à Saint-Ouen.

En 1936 et jusqu’au moment de son arrestation, Roger Chaput est hébergé dans le pavillon de ses beaux-parents, Valentin Alcide et Suzanne Tessier, au 16, rue des Châteaux à Saint-Ouen. En 1936, ceux-ci sont respectivement ébéniste pour la Compagnie des Chemins de fer de l’État à Paris 8e, et employée des Finances à Paris 15e. Roger Chaput est alors paveur pour la société La Productrice à Saint-Ouen.

À une date restant à préciser, il adhère au Parti communiste.

Sous l’occupation, le commissaire de police de Saint-Ouen le signale « comme devant être interné au cas de troubles intérieurs graves ».

Le 24 octobre 1941, le commissaire de police de Saint-Ouen mène une perquisition infructueuse à son domicile. « Nous sommes reçus par Madame Chaput, née Tessier Suzanne (…). Le ménage occupe le premier étage d’un pavillon composé d’une entrée, d’une cuisine, d’une salle à manger est d’une chambre à coucher ; rien à signaler ; nous visitons également le rez-de-chaussée du pavillon habité par madame Tessier, belle-mère du nommé Chaput, même disposition de pièces, aucun résultat. Nous visitons aussi la cave et le grenier de la maison et n’y découvrons aucun objet suspect. » L’officier de police en adresse aussitôt le compte-rendu à la direction des Renseignements généraux qui, la veille, a sollicité six “visites domiciliaires” à Saint-Ouen.

Le 28 avril 1942, Roger Chaput est arrêté à son domicile par des Feldgendarmes accompagnés de policiers français, comme otage, lors d’une grande vague d’arrestations collectives (397 personnes) organisée par « les autorités d’occupation » dans le département de la Seine, visant majoritairement des militants du Parti communiste clandestin. Les hommes arrêtés sont rapidement conduits au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmach (Frontstalag 122 – Polizeihaftlager).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C, qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation. L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

La caserne de Royallieu en 1957 ; au deuxième plan, les six grands bâtiments alignés du quartier C,
qui semblent avoir souvent servi au regroupement des internés sélectionnés pour la prochaine déportation.
L’enceinte et les miradors du camp ont disparu (les deux hangars en bas à gauche n’existaient pas).

Entre fin avril et fin juin 1942, Roger Chaput est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).

Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.

TransportAquarelle

Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.

Le 8 juillet 1942, Roger Chaput est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45352 (sa photo d’immatriculation a été retrouvée).

Après l’enregistrement, les 1170 arrivants sont entassés dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.

Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau où ils sont répartis dans les Blocks 19 et 20.

Le 10 juillet, après l’appel général et un bref interrogatoire, ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos.

Le 13 juillet – après cinq jours passés par l’ensemble des “45000” à Birkenau – Roger Chaput figure dans la moitié des membres du convoi qui est ramenée au camp principal (Auschwitz-I) après l’appel du soir.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).  Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Portail de l’entrée principale d’Auschwitz-I , le “camp souche” : « Arbeit macht frei » (le travail rend libre).
Carte postale. Collection mémoire Vive. Photo : Stanislas Mucha.

Assigné au Block 14, il est admis au Block 20 (contagieux) de l’« hôpital » le 7 août, quatre semaines après l’arrivée du convoi.
C’est là qu’il meurt le 13 août 1942, d’après plusieurs registres du camp établis par l’administration SS.
Le 8 janvier 1947, le tribunal civil de la Seine prononce par jugement que sa fille Christiane est adoptée par la Nation.

Le 6 juin 1947, l’état civil français le déclare décédé le 25 août 1942 à Auschwitz.

La mention « Mort en déportation » est apposée sur les actes et jugements déclaratifs de décès (JORF n° 300 du 27 décembre 2009).À Saint-Ouen, son nom est inscrit sur la stèle érigée en « Hommage aux résistants, femmes, hommes, déportés à Auschwitz-Birkenau ».

Le monument dédié aux dix-sept “45000” de Saint-Ouen et à Marie-Jeanne Bauer, “31000”, inauguré le 24 avril 2005 dans le square des 45000 et des 31000.

Le monument dédié aux dix-sept “45000” de Saint-Ouen
et à Marie-Jeanne Bauer, “31000”, inauguré le 24 avril 2005
dans le square des 45000 et des 31000.

Augustine Tessier décède le 15 mars 2011 à Maisons-Laffitte (Yvelines), âgée de 99 ans.

Notes :

[1] Saint-Ouen : jusqu’à la loi du 10 juillet 1964, cette commune fait partie du département de la Seine, qui inclut Paris et de nombreuses villes de la “petite couronne”, dont la “ceinture rouge” des municipalités dirigées par des maires communistes (transfert administratif effectif en janvier 1968).

 

Sources :

- Son nom et son matricule figurent sur la Liste officielle n°3 des décédés des camps de concentration d’après les archives de Pologne, éditée le 26 septembre 1946 par le ministère des anciens combattants et victimes de guerre, page 60.
- Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 387 et 398.
- Archives de la préfecture de police (Seine / Paris) : cartons “occupation allemande” : BA ? (…) ; dossier individuel au service des Renseignements généraux (77 W 123-112997).
- Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 164 (20075/1942).
- Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach), document extrait des archives : page du registre d’appel avec la liste des détenus décédés le 13 août 1942.

MÉMOIRE VIVE

(dernière mise à jour, le 25-05-2022)

Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).

En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.