Roger, Charles, Déjameau, né le 20 août 1907 à Niort (Deux-Sèvres), domicilié à Niort, mort à Auschwitz le 26 février 1943.
- Droits réservés.
Roger, Charles, Déjameau naît le 20 août 1907 à Niort (Deux-Sèvres – 79), chez ses parents, Gustave Amédée Déjameau, 27 ans, foulonnier, et Mathilde Hortense Léau, 26 ans, son épouse, domiciliés au 5 rue du Fort Foucault. Les témoins pour la présentation du nouveau-né à l’état-civil sont un oncle paternel de l’enfant et un collègue du père, tous deux chamoiseurs. Roger a – au moins – une sœur aînée, Georgette, née à Niort en 1903.
Leur père est mobilisé dans l’artillerie du 3 avril 1915 au 23 janvier 1919.
Le 5 octobre 1929, à Niort, Roger Déjameau se marie avec Alexandrine Meneau.
Au moment de son arrestation, il est probablement domicilié à Niort (adresse à préciser).
Roger Déjameau est électricien à la Société française d’éclairage et de chauffage par le gaz à Niort.
Militant communiste dévoué et dynamique, Roger Déjameau appartient à la cellule n°1 de la rue de Strasbourg et met en place – avant même la création des CDH (Comités de défense de L’Humanité) – une équipe de vendeurs bénévoles pour la diffusion du journal local du Parti communiste, Le Semeur. Chaque dimanche, il fait « 50 km à vélo » pour distribuer la presse communiste. Il est à l’origine de la création d’une cellule à Chauray (79). Partout, il suscite la sympathie, par son caractère « gai, enjoué, avenant » et « par son habilité dans la discussion ».
Au cours de l’été 1940, après sa démobilisation, Roger Déjameau reprend son action dans le Parti communiste clandestin. Avec ses camarades Poupeau et Ravard, il écrit, sur l’avenue de Paris, à Niort, l’inscription qui servira de prétexte à son arrestation : « Libérez nos camarades. À mort Hitler ».
Le 27 juillet 1941, Roger Déjameau est arrêté par la police française, avec ses deux compagnons. Détenu à la prison de Niort, il est jugé en février 1942 et condamné à six mois de détention (déjà purgés en “préventive”). Puis il est interné au camp français de Rouillé (Vienne).
Le 18 mars 1942, Roger Déjameau est parmi les treize “jeunes” communistes « extraits par les autorités allemandes et transférés, pour des raisons qui n’ont pas été indiquées » au camp allemand de Royallieu à Compiègne (Oise), administré et gardé par la Wehrmacht (Frontstalag122 – Polizeihaftlager) ; tous sont de futurs “45000” sauf André Giraudon, de Bourges, fusillé au Mont-Valérien le 9 mai 1942. Roger Déjameau est enregistré à Royallieu sous le matricule 3809.
Entre fin avril et fin juin 1942, Roger Déjameau est sélectionné avec plus d’un millier d’otages désignés comme communistes et une cinquantaine d’otages désignés comme juifs dont la déportation a été décidée en représailles des actions armées de la résistance communiste contre l’armée allemande (en application d’un ordre de Hitler).
Le 6 juillet 1942 à l’aube, les détenus sont conduits à pied sous escorte allemande à la gare de Compiègne, sur la commune de Margny, et entassés dans des wagons de marchandises. Le train part une fois les portes verrouillées, à 9 h 30.
Le voyage dure deux jours et demi. N’étant pas ravitaillés en eau, les déportés souffrent principalement de la soif.
Le 8 juillet 1942, Roger Déjameau est enregistré au camp souche d’Auschwitz (Auschwitz-I) sous le numéro 45474 (sa photo d’immatriculation n’a pas été retrouvée).
Après les premières procédures (tonte, désinfection, attribution d’un uniforme rayé et photographie anthropométrique), les 1170 arrivants sont entassés pour la plupart dans deux pièces nues du Block 13 où ils passent la nuit.
Le lendemain, vers 7 heures, tous sont conduits à pied au camp annexe de Birkenau ; alors choisi pour mettre en œuvre la « solution finale » – le génocide des Juifs européens -, ce site en construction présente un contexte plus meurtrier pour tous les concentrationnaires. À leur arrivée, les “45000” sont répartis dans les Blocks 19 et 20 du secteur B-Ib (le premier créé).
Le 10 juillet, après l’appel général, ils subissent un bref interrogatoire d’identité qui parachève leur enregistrement et au cours duquel ils déclarent une profession (celle qu’ils exerçaient en dernier lieu ou une autre, supposée être plus “protectrice” dans le contexte du camp) ; Roger Déjameau se déclare alors sans religion (Glaubenslos). Puis ils sont envoyés au travail dans différents Kommandos. L’ensemble des “45000” passent ainsi cinq jours à Birkenau.
Le 13 juillet, après l’appel du soir, Roger Déjameau est dans la moitié des déportés du convoi sélectionnés pour rester dans ce sous-camp, alors que les autres sont ramenés à Auschwitz-I.
Le 1er novembre 1942, dans la chambre (Stube) n° 5 de l’infirmerie (Revier) des détenus de Birkenau (Block n° 8 – en brique – du secteur BIb), il reçoit douze gouttes d’un bactéricide, l’Anisine.
Le 12 janvier 1943, son nom est encore inscrit sur ce registre.
Roger Déjameau meurt à Auschwitz le 26 février 1943, selon l’acte de décès établi par l’administration SS du camp (Sterbebücher) [1].
Début 1948, l’état civil français le déclare « décédé à Auschwitz-Birkenau (Pologne) en novembre 1942 ».
La mention “Mort en déportation” est apposée sur son acte de décès (J.O. du 10-03-1988).
Notes :
[1] Différence de date de décès avec celle inscrite sur les actes d’état civil en France : Dans les années qui ont suivi la guerre, devant l’impossibilité d’obtenir des dates précises de décès des déportés, mais soucieux d’établir les documents administratifs nécessaires pour le versement des pensions aux familles, les services français d’état civil – dont un représentant officiait au ministère des Anciens combattants en se fondant sur diverses sources, parmi lesquelles le témoignage approximatif des rescapés – ont très souvent fixé des dates fictives : le 1er, le 15, le 30, le 31 du mois, voire le jour (et le lieu !) du départ. S’agissant de Roger Dejameau, c’est le mois de novembre 1942 qui a été retenu pour certifier son décès. Leur inscription sur les registres d’état civil rendant ces dates officielles, certaines ont quelquefois été gravées sur les monuments aux morts.
Sources :
Claudine Cardon-Hamet, Triangles rouges à Auschwitz, Le convoi politique du 6 juillet 1942, Éditions Autrement, collection mémoires, Paris 2005, pages 127 et 128, 377 et 401.
Cl. Cardon-Hamet, Mille otages pour Auschwitz, Le convoi du 6 juillet 1942 dit des “45000”, Éditions Graphein, Paris nov. 2000, page 517.
Cl. Cardon-Hamet, notice pour l’exposition de Mémoire Vive sur les “45000” et “31000” des Deux-Sèvres, citant : Lettre de sa veuve (1973) – Article dans le journal Le Semeur du 24 janvier 1947, signé par Edmond Brisseau – Archives municipales de Niort.
Archives départementales de la Vienne : camp de Rouillé (109W75).
Death Books from Auschwitz, Remnants, Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau, K.G.Saur, 1995 ; relevé des registres (incomplets) d’actes de décès du camp d’Auschwitz dans lesquels a été inscrite, du 27 juillet 1941 au 31 décembre 1943, la mort de 68 864 détenus pour la plupart immatriculés dans le camp (sans indication du numéro attribué), tome 2, page 218 (11112/1943).
Archives du Musée d’État d’Auschwitz-Birkenau (APMAB), Oświęcim, Pologne, Bureau d’information sur les anciens prisonniers (Biuro Informacji o Byłych Więźniach) : copie de la page 21 d’un registre de délivrance de médicaments aux détenus du Revier de Birkenau (matricule 45974, Déjameau).
MÉMOIRE VIVE
(dernière mise à jour, le 8-02-2024)
Cette notice biographique doit être considérée comme un document provisoire fondé sur les archives et témoignages connus à ce jour. Vous êtes invité à corriger les erreurs qui auraient pu s’y glisser et/ou à la compléter avec les informations dont vous disposez (en indiquant vos sources).
En hommage à Roger Arnould (1914-1994), Résistant, rescapé de Buchenwald, documentaliste de la FNDIRP qui a initié les recherches sur le convoi du 6 juillet 1942.